Six mois après que le Mali a interdit le financement français des ONG, comment les groupes d’aide s’en sortent-ils ?

Sur 294 ONG locales et internationales opérant au Mali lorsque les autorités de transition ont imposé l’interdiction le 21 novembre 2022,environ 40 étaient français.

Ce n’était qu’un des résultats de l’aigrissement des relations entre la France et le Mali après le coup d’État de 2020 dirigé par Colonel Assimi Gota.

Le gouvernement intérimaire n’a pas interdit toutes les ONG françaises travaillant au Mali, mais seulement les activités soutenues financièrement ou matériellement par l’État français, qui finance des actions d’aide à l’étranger à traversson Agence française de développement (AFD).

L’ambassade de France au Mali n’a pas confirmé à RFI combien de groupes d’aide français opèrent toujours dans le pays.

Mais ceux qui restent ont dû chercher divers moyens pour surmonter la perte de financement, certains avec plus de succès que d’autres.

Pour des raisons de sécurité, les personnes interrogées et leurs organisations ne sont pas divulguées.

Financement alternatif

De tous les programmes que nous avons mis en attente [from November 2022]nous n’avons eu qu’à arrêter l’un d’entre eux tout à fait, a déclaré à RFI David Bach, directeur d’une grande ONG humanitaire française travaillant dans le nord et le centre du Mali.

Environ 30% de son financement provenait de l’AFD et a été remplacé par des fonds d’autres sources, à savoir l’Union européenne.

Le groupe d’aide a dû réduire légèrement le nombre d’employés français, mais n’a licencié aucun personnel malien.

Après avoir caressé l’idée de quitter définitivement le Mali, son directeur a déclaré à RFI qu’il était convaincu que l’ONG pourrait continuer à travailler dans le pays.

Projets interrompus

D’autres organisations disent que les conséquences ont été plus graves.

Il y a six mois, nous avons dû arrêter tous les programmes financés par l’AFD. Cela représente environ 30 à 40 % de nos activités totales dans le pays. Et nous n’avons toujours pas pu les reprendre, a déclaré à RFI le directeur d’une ONG internationale impliquée dans les urgences alimentaires et médicales.

L’organisation a contacté d’autres bailleurs de fonds qui ont refusé de remplacer le financement de l’AFD.

En conséquence, nous n’avons pas pu forer de puits, ce qui pose des problèmes d’accès à l’eau potable et augmente les risques de diverses maladies, a ajouté le directeur.

Nous avons également prévu d’éclairer les centres de santé afin qu’ils puissent rester ouverts le soir. Ceci, ainsi qu’un certain nombre d’autres choses, ne se produira pas.

Nous espérons bien pouvoir combler le déficit de financement l’année prochaine.

Conséquences dans le monde réel

Les groupes d’aide locaux qui dépendaient du financement français ont également été touchés.

Vingt-cinq pour cent de nos fonds provenaient de France, a déclaré à RFI le responsable d’une ONG de santé malienne.

Grâce à d’autres donateurs, nous avons finalement réussi à reprendre 60 % des activités que nous avions suspendues.Mais 40 % de nos activités sont encore complètement arrêtées.

Nous cherchons des moyens de financement alternatifs mais nous savons, c’est sûr, que nous ne pourrons pas continuer une partie de notre travail. C’est vraiment dommage car cela affecte la vie des gens.

Il s’avère difficile pour les ONG de trouver des substituts adéquats à l’AFD, l’agence française se concentrant principalement sur des projets à long terme et non sur l’aide d’urgence.

Certaines ONG maliennes signalent qu’elles ont dû licencier une partie de leur personnel local.

Une bureaucratie chronophage

Les autorités maliennes sont strictes sur la transparence en matière de financement des ONG.

Il y a six mois, le gouvernement de transition du Mali a mis en place une commission, rattachée au ministère de l’Administration territoriale, dont le rôle est de surveiller de près le financement de toutes les ONG basées au Mali et de veiller au respect de l’interdiction française.

Chaque mois, nous devons montrer des rapports financiers et des contrats aux autorités locales, au bureau du gouverneur et à l’administration centrale. C’est beaucoup de travail ! a déclaré le chef du bureau d’une ONG internationale au Mali.

Cela signifie que nous passons chaque mois plusieurs jours ouvrables, parcourons de longues distances et utilisons des ressources humaines et logistiques pour produire les documents requis au lieu de faire notre travail sur le terrain.

Les humanitaires qui se sont entretenus avec RFI admettent que, s’ils ont pu être quelques-unsdes retards dans l’obtention des autorisations à temps, jusqu’à présent ils n’ont pas été empêchés de faire leur travail.

Cependant, certains ont exprimé leur inquiétude quant à la façon dont toutes les données qu’ils fournissent aux autorités pourraient être utilisées à l’avenir comme moyen de faire pression ou même d’arrêter complètement les programmes humanitaires.

Le ministère de l’Administration territoriale a décliné la demande de commentaires de RFI.

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