Pourquoi la France et l’Allemagne ne se découpleront pas de la Chine | Le stratège

Alors que la Chine s’affirme de plus en plus dans la poursuite de ses intérêts économiques et géopolitiques à l’étranger, les tensions américano-chinoises augmentent, ce qui conduit de nombreux alliés américains traditionnels à envisager de suivre l’exemple de Washington dans la poursuite du découplage économique de la Chine. Leur stratégie vise à réduire la dépendance économique vis-à-vis de la Chine grâce à des contrôles étendus des exportations et à des chaînes d’approvisionnement réorganisées.

Pourtant, en Europe occidentale, la France et l’Allemagne montrent une réticence à rejoindre leurs alliés dans le découplage de la Chine. Les récents commentaires du président français Emmanuel Macron selon lesquels l’Europe ne devrait pas se laisser entraîner dans des crises qui ne sont pas les nôtres le démontrent.

Au contraire, leur relation avec le capital chinois est florissante. La Chine est l’un des principaux partenaires commerciaux de la France et de l’Allemagne en dehors de l’Union européenne et un marché d’exportation important pour des produits tels que les produits de luxe et les produits pharmaceutiques.

Les exportations vers la Chine représentaient 7,4 % des exportations totales de l’Allemagne et 4,21 % de la France en 2019, ces chiffres ayant augmenté au cours des trois dernières années pour atteindre des niveaux records. Compte tenu de la croissance de la classe moyenne en Chine, le pays présente un énorme marché de consommation potentiel dans les années à venir.

Selon des rapports récents, le commerce bilatéral de marchandises de la France avec la Chine a dépassé les 100 milliards de dollars américains pour la première fois en 2022, soit une augmentation de 14,6 % par rapport à 2021. La récente signature de 18 accords de coopération par 46 entreprises françaises et chinoises dans de nombreux secteurs souligne davantage la l’accélération de ces relations commerciales.

Quant à l’Allemagne, son commerce total avec la Chine a augmenté de 21 % par rapport à 2021. Alors que les exportations n’ont augmenté que d’un modeste 3,1 %, les importations allemandes en provenance de Chine ont représenté une grande partie de la croissance, grimpant de plus d’un tiers.

Plus précisément, l’Allemagne importe de Chine environ les deux tiers de ses éléments de terres rares, dont beaucoup sont indispensables dans les batteries, les semi-conducteurs et les aimants des voitures électriques. Cela montre que l’Allemagne et la France dépendront davantage de la Chine au fil du temps pour les matières premières critiques nécessaires pour alimenter leur croissance économique et leurs transitions énergétiques.

En outre, diverses entreprises françaises et allemandes préféreraient développer leurs installations de production établies et leurs vastes réseaux de vente en Chine. Avec l’expansion si rapide des relations commerciales et les estimations suggérant que plus de 2 millions d’emplois allemands dépendent des exportations vers la Chine, les économies des pays sont appelées à devenir encore plus imbriquées.

Les entreprises allemandes Volkswagen et le transformateur de produits chimiques BASF, par exemple, augmentent considérablement leurs investissements en Chine. Volkswagen, qui possède déjà plus de 40 usines en Chine, a récemment annoncé qu’il investirait des milliards dans de nouveaux partenariats et sites de production locaux. BASF, qui en compte 30, a annoncé qu’elle y investirait 10,9 milliards de dollars dans un nouveau complexe de production chimique.

Compte tenu de toute cette nouvelle activité, faire étalage du découplage vis-à-vis de la Chine pourrait avoir des répercussions importantes pour la France et l’Allemagne.

En fin de compte, les coûts du découplage l’emportent sur les avantages pour les deux gouvernements. Alors que leurs alliés pourraient en venir à déplorer leur inaction, ils ne renonceront tout simplement pas à des opportunités aussi importantes pour les entreprises françaises et allemandes en Chine.

De plus, le découplage pourrait déclencher des représailles, comme ce fut le cas avec l’Australie, la Chine arrêtant les exportations vers les deux pays, augmentant les tarifs ou réduisant l’accès au marché des produits français et allemands. Au total, la France et l’Allemagne ne devraient pas changer de position. Ils préféreraient laisser leurs marchés prospérer et régler le reste plus tard.

www.actusduweb.com
Suivez Actusduweb sur Google News


Ce site utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que cela vous convient, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite