Ne nous contentons pas de cohabiter pacifiquement, ayons l’ambition de vivre ensemble
Madame la Présidente,
Je voudrais remercier le Secrétaire général, le Grand Imam d’Al-Azhar, Mgr Gallagher et Mme Ibn Ziaten pour leurs exposés.
La fraternité et la tolérance sont des valeurs essentielles. Nous les partageons tous. Mais rappelons aussi, en ce 75e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, qu’il existe un cadre normatif et des obligations internationales, telles que définies par les traités. La fraternité revêt une importance particulière pour la France. Elle apparaît dans la devise de nos Républiques, aux côtés – et c’est très important – de la liberté et de l’égalité. Car l’un ne peut exister sans les deux autres, et ensemble ils forment le socle de nos valeurs républicaines.
À cet égard, je salue le travail de l’Association IMAD, fondée par Mme Ibn Ziaten, dans la promotion de ces valeurs et la prévention de la radicalisation.
Ne soyons pas sélectifs. Comment peut-on parler de tolérance si l’on suggère que seules certaines personnes et pas d’autres sont dignes de tolérance ?
Le respect du droit international, et en particulier des droits de l’homme, des libertés fondamentales et de l’état de droit, est la condition sine qua non d’une paix durable et a donc toute sa place au Conseil de sécurité. Les droits que les femmes, les enfants et les personnes appartenant à tous les types de minorités détiennent, comme tous les individus, en vertu du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme doivent être pleinement respectés. Toutes les formes de discrimination et d’incitation à la violence doivent être condamnées. Et je veux dire tout. Toutes les personnes, dans toute leur diversité, doivent pouvoir bénéficier de la même protection. C’est pourquoi la France, qui incarne la diplomatie féministe et la défense des droits humains, appelle tous les États membres à signer, ratifier et respecter, sans exception, toutes les conventions internationales garantissant toutes les formes de droits humains.
La tolérance et la fraternité ne suffisent pas.
Yézidis, Rohingyas, femmes en Afghanistan, personnes LGBT+ demandent simplement que leurs droits soient respectés. Les violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire nuisent aux populations civiles et alimentent les conflits. L’impunité engendre la violence.
Madame la Présidente,
Le respect des droits de l’homme est le fondement essentiel sur lequel doit se construire le dialogue. La reconnaissance de l’exercice de la liberté de religion et de conviction dans toutes ses dimensions, y compris le droit de changer de religion et le droit de ne pas en avoir, en est une composante essentielle. Le dialogue exige également la capacité d’entendre les avis divergents et les critiques. Reconnaître le droit de s’exprimer librement et accepter des opinions divergentes est un élément essentiel du dialogue. L’exercice de la liberté de religion ou de conviction est impensable sans l’exercice de la liberté d’expression, une liberté qui n’est limitée que par des frontières strictement définies par le droit international.
Le discours de haine, qui encourage ou justifie la haine, la violence ou la discrimination, est clairement inacceptable et est donc interdit par le droit international.
Madame la Présidente,
En France, en vertu du principe de laïcité, l’État ne s’immisce pas dans les affaires religieuses. La foi est un choix individuel et l’État respecte la liberté de croyance de chacun. Il garantit que tous les croyants peuvent pratiquer leur religion.
Cela ne vise pas à ignorer la diversité des opinions, des cultures et des croyances qui existent à travers le monde. Mais il nous semble que le meilleur moyen de limiter les conflits qui naissent entre eux est que les pouvoirs publics, tout en veillant à ce que les conditions du dialogue entre différentes croyances soient réunies et préservées, ne s’immiscent jamais dans ce qui est avant tout la exercice d’une liberté individuelle.
Nous saluons le rôle de pacificateur joué par certains chefs et organisations religieux. Tout comme nous condamnons toute rhétorique d’autres chefs et organisations religieux, attisant la haine et la violence.
Femmes, hommes, jeunes et vieux, croyants et non-croyants : nous avons tous un rôle à jouer pour promouvoir la réconciliation et la paix. La société civile, y compris les défenseurs des droits de l’homme, a un rôle essentiel à jouer dans la préservation de la paix.
Madame la Présidente,
Le rôle de ce Conseil est d’œuvrer au maintien de la paix et de la sécurité internationales. Le respect du droit international en est la condition première et essentielle et doit nous guider dans notre travail concret, crise par crise, région par région, à l’élaboration de solutions politiques. Le règlement des différends nécessite des solutions politiques qui associent toutes les parties prenantes.
Aujourd’hui, nous avons entendu parler de coexistence pacifique. Soyons plus ambitieux et choisissons de vivre ensemble. Chacun, tel qu’il est, se respectant et se tolérant ainsi que ses droits individuels. Ne nous contentons pas d’une cohabitation pacifique, ayons l’ambition de vivre ensemble.
Madame la Présidente,
Soyez assurés que la France sera toujours aux côtés de ceux qui se battent pour la liberté, l’égalité et la fraternité. Ces idéaux sont gravés dans notre histoire et dans nos institutions, tout comme les droits de l’homme, qui constituent – je l’ai dit – le cadre le plus complet et le plus protecteur pour tous. Conformément aux buts et principes de la Charte des Nations Unies, la France continuera de promouvoir cette approche universelle au sein du Conseil de sécurité et de toutes les autres instances des Nations Unies.
Merci.