L’Europe doit voir plus grand pour construire son union des marchés des capitaux

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Fabio Panetta est membre du directoire de la Banque centrale européenne depuis 2020.

Face aux tensions géopolitiques croissantes et aux défis mondiaux urgents tels que les transitions climatique et numérique, l’Europe doit renforcer sa résilience aux chocs et investir de manière stratégique. Pour y parvenir, nous devons travailler ensemble, car une Europe plus intégrée est mieux placée pour réaliser des objectifs communs dans une économie mondiale fragmentée.

Au cœur de cette stratégie se trouve la création d’un marché des capitaux européen intégré, une vision définie par la Commission européenne en 2015 et communément connue sous le nom d’union des marchés des capitaux (UMC).

Une UMC pleinement opérationnelle renforcerait la structure économique de l’Europe et profiterait à la zone euro. Cela se ferait de trois manières principales :

Cela nous permettrait de récolter les fruits des marchés de capitaux à l’échelle de la zone euro et de faciliter un meilleur partage des risques entre les pays membres. À l’heure actuelle, les barrières entre les marchés nationaux dissuadent les investissements transfrontaliers, laissant les entreprises et les ménages européens largement dépendants des financements nationaux et trop exposés aux chocs économiques nationaux. En éliminant ces barrières, l’UMC faciliterait les flux d’investissement à travers la zone euro, ce qui diversifierait les risques et atténuerait les effets des chocs locaux.

Il existe également un besoin urgent que l’UMC complète les canaux bancaires traditionnels pour financer l’innovation vitale pour la croissance future de l’Europe, notamment dans les secteurs de l’énergie et de la technologie. Le financement par actions et les formes spécialisées d’investissement, telles que le capital-risque, sont généralement plus adaptés que le financement par emprunt pour financer l’innovation, dans la mesure où de tels projets impliquent souvent des niveaux de risque élevés et des rendements incertains, ce qui rend difficile l’engagement de remboursements réguliers de la dette.

Enfin, une UMC pleinement opérationnelle serait bénéfique pour la mise en œuvre de la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE). En favorisant des marchés de capitaux profonds, liquides et intégrés, l’UMC favoriserait une transmission rapide, fluide et uniforme de la politique monétaire aux entreprises et aux ménages.

Depuis que la Commission a lancé son plan d’action pour l’UMC en 2015, des progrès ont été réalisés. Par exemple, l’Union européenne a adopté une législation visant à développer les marchés de titrisation de l’UE et à améliorer ainsi l’accès des entreprises au financement. Il a également harmonisé davantage les règles prudentielles pour les entreprises d’investissement et assoupli les conditions d’investissement du capital-risque européen afin de promouvoir le financement par capital-risque.

Des mesures supplémentaires sont également prises dans le cadre du plan d’action 2020 de l’UMC pour simplifier les règles de cotation publique des entreprises de l’UE, harmoniser les régimes nationaux d’insolvabilité et résoudre les problèmes liés à la fiscalité des instruments financiers, qui entravent les investissements transfrontaliers et réduisent le financement par fonds propres. plus intéressant que le financement par emprunt.

Mais malgré ces progrès, les résultats ne sont pas encore satisfaisants. Le marché des capitaux européen reste fragmenté au-delà des frontières nationales, et l’analyse de la BCE montre que l’intégration financière en Europe est encore bien inférieure à ce qu’elle était avant la crise financière mondiale.

De plus, les marchés de capitaux européens sont moins développés que ceux des autres économies avancées. Dans la zone euro, les marchés obligataires en pourcentage du PIB sont trois fois plus petits qu’aux États-Unis. Et bien que les actions représentent la principale source de financement des entreprises dans les deux pays, dans la zone euro, elles sont principalement non cotées, tandis qu’aux États-Unis, la plupart des actions sont cotées, ouvrant ainsi les entreprises à un plus grand nombre d’investisseurs potentiels.

L’Europe joue néanmoins un rôle de premier plan sur certains segments de marché, comme celui des obligations vertes. Mais le marché des obligations vertes reste une niche, représentant moins de 3 % du marché obligataire mondial. De plus, à mesure que la transition verte s’accélère, l’avantage vert de l’Europe pourrait s’estomper si nous ne progressons pas dans l’UMC. Par exemple, l’activité de capital-risque, qui s’est avérée essentielle pour financer l’innovation verte et la décarbonation, reste limitée dans la zone euro. Et certains signes montrent que le marché européen des obligations vertes est de plus en plus fragmenté, ce qui témoigne d’un manque de normes communes et d’obstacles aux investissements transfrontaliers.

L’analyse de la BCE montre que l’intégration financière en Europe est encore bien inférieure à ce qu’elle était avant la crise financière mondiale | Ralph Orlowski/Getty Images

Tout cela donne à penser que la simple suppression des obstacles spécifiques à l’intégration du marché ne suffira peut-être pas à établir une véritable UMC. Nous devons garder les yeux tournés vers une vision plus large, et il existe deux angles morts critiques dans le développement d’une véritable CMU.

Le premier est l’absence d’un actif sûr européen permanent.

Historiquement, les marchés de capitaux matures se sont construits autour d’un actif public sûr. Aux États-Unis, par exemple, les marchés de capitaux se sont développés parallèlement à l’émission d’obligations fédérales.

Une référence sans risque est nécessaire pour les activités financières critiques. Cela permettrait une meilleure tarification des produits financiers risqués, tels que les obligations d’entreprises ou les produits dérivés, encourageant ainsi le développement de tels produits. Il fournirait une forme commune de garantie qui favoriserait l’activité de compensation centralisée et les échanges transfrontaliers garantis sur les marchés interbancaires. Cela contribuerait également à diversifier l’exposition bancaire et non bancaire. Et cela soutiendrait le rôle international de l’euro, en aidant à attirer les investisseurs étrangers.

La création d’un tel actif européen sûr et permanent changerait la donne, mais cela dépend de la capacité budgétaire permanente de l’Europe, dotée d’une fonction d’emprunt. Sans cela, la construction d’une CMU solide et compétitive s’avérera bien plus difficile.

Le deuxième point aveugle est l’absence d’une union bancaire complète, qui restreint les banques européennes à opérer sur un ou quelques marchés nationaux seulement.

Les banques jouent un rôle crucial dans le fonctionnement de tous les principaux marchés de capitaux. Ils opèrent et jouent souvent un rôle de premier plan dans des segments cruciaux tels que la gestion d’actifs, la souscription et la négociation d’obligations, les introductions en bourse et le conseil financier. Ce sont des négociants actifs sur les marchés de valeurs mobilières et fournissent souvent des services de tenue de marché. Il est donc difficile d’envisager une véritable CMU sans que les principaux acteurs soient capables d’opérer dans l’ensemble de la zone euro.

Le paysage mondial évolue rapidement et l’Europe doit suivre le rythme de ce changement, voire le diriger. Pour réussir, elle a besoin d’une CMU véritable et complète.

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