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Le Tchad n’est « pas un esclave qui veut changer de maître », déclare le président

Le Tchad se rendra aux urnes le mois prochain pour une élection présidentielle qui espère marquer un retour à un régime démocratique trois ans après la prise du pouvoir par les chefs militaires. Parallèlement, l’influence croissante de la Russie en Afrique bouleverse les liens historiques avec la France. Le dirigeant de la transition Mahamat Idriss Déby, candidat au maintien au pouvoir, s’est entretenu avec RFI et la chaîne sœur France 24 sur le vote, la Russie et l’avenir des relations du Tchad avec la France. .

RFI/France 24 : L’élection présidentielle au Tchad est prévue le 6 mai et certains observateurs estiment que son résultat est déjà joué d’avance. Les membres de l’opposition dénoncent cela comme une imposture, prétendant que vous contrôlez toutes les institutions électorales.

Le Tchad organisera-t-il de véritables élections ?

Mahamat Idriss Déby :Nous avons fait du chemin avec toute la classe politique et aussi une grande partie des ex-politico-militaires (anciens rebelles). Et toutes les institutions créées par la nouvelle constitution sont indépendantes.

Le plus important est le Agence nationale de gestion des lectionsANGE… Aujourd’hui, ANGE est indépendante.

Alors je pense que ceux qui disent que c’est une imposture ou que l’élection est déjà décidée, eh bien, je comprends : c’est ça la politique, c’est du fair-play.

Mais j’ai confiance dans l’agence (électorale), qui jouera son rôle pleinement et en toute indépendance.

Vous verrez que le 6 mai, le peuple tchadien choisira. Ils éliront un président qui dirigera ce pays pour les cinq prochaines années et le choix du peuple sera respecté.

RFI/F24 : Le 28 février 2024, l’opposant Yaya Dillo a été tué lors d’un assaut de l’armée tchadienne contre le siège de son parti. Son parti a qualifié cela d’exécution et Human Rights Watch affirme que son corps a reçu une seule balle dans la tête.

Comment réagissez-vous aux affirmations selon lesquelles vous avez éliminé votre adversaire le plus féroce ?

MILIEU:Yaya Dillo et ses militants ont attaqué le siège des services de renseignement avec des armes de guerre. Un parti politique a-t-il le droit de porter les armes ? Les militants d’un parti politique ont-ils le droit de détenir des armes ? C’est la question.

Lors de cette attaque macabre, il y a eu des morts : des morts du côté des forces de défense et de sécurité, mais aussi parmi les militants du PSF (du parti de Dillo).

Il était donc tout à fait normal que l’État s’attende à ce que l’auteur de cette attaque soit arrêté pour répondre de ses actes.

La police est intervenue pour l’arrêter. Il a refusé d’obtempérer. Au contraire, il a tiré sur la police et la police a riposté. Il y a eu des morts des deux côtés.

L’affaire est désormais entre les mains des tribunaux. Nous allons attendre la décision du tribunal.

Et nous avons clairement indiqué que nous étions également ouverts à une enquête indépendante, ce qui signifie que nous n’avons rien à cacher.

RFI/F24 : Vous êtes ouvert à une enquête ?

MILIEU: Une enquête internationale.

RFI/F24 : Dans combien de temps ?

Dès le début, nous avons publié un communiqué de presse pour expliquer à nos concitoyens et à l’étranger ce qui s’était passé. Et nous avons également demandé une enquête indépendante.

RFI/F24 : Vous avez rendu une visite remarquée au président russe Vladimir Poutine fin janvier 2024, qualifiant la Russie de « pays frère ». Envisagez-vous une coopération militaire avec Moscou du type de celle que le Niger a récemment acceptée ?

MILIEU: Nous avons eu des discussions très fructueuses avec le président Poutine, basées sur le respect mutuel et sur les questions sur lesquelles nous sommes d’accord. Sur des questions qui nous concernent, entre deux États souverains.

RFI/F24 : Cela inclut-il la coopération en matière de sécurité ?

MILIEU: Il ne s’agit pas seulement de coopération militaire. Il existe d’autres domaines de coopération. Pourquoi parle-t-on toujours de coopération militaire lorsqu’il s’agit des pays africains ?

Il existe d’autres formes de coopération : la coopération économique, qui est aujourd’hui très importante pour nos pays.

Nous avons parlé de beaucoup de choses : coopération militaire, coopération économique, coopération diplomatique… Je peux vous dire que je suis satisfait de la visite.

RFI/F24 : Envisagez-vous un changement d’alliance militaire ? Envisagez-vous d’abandonner votre alliance avec la France et de nouer une alliance avec la Russie ?

MILIEU: Le Tchad est un pays indépendant, libre et souverain. Nous ne sommes pas comme un esclave qui veut changer de maître. Nous entendons travailler avec toutes les nations du monde, toutes les nations qui nous respectent et veulent travailler avec nous dans le respect mutuel.

RFI/F24 : Concrètement, cela signifie-t-il que le contingent français de plus de 1 000 hommes et les trois bases militaires françaises actuellement au Tchad resteront ?

MILIEU:(Envoyé spécial de la France pour l’Afrique) Jean-Marie Bockel s’est récemment rendu au Tchad. Nous avons discuté de l’avenir de notre coopération.

Nous avons eu des discussions, nous allons poursuivre nos discussions et ensemble, avec souveraineté, nous allons décider de notre future coopération.

Et cette coopération ne doit pas se limiter à la défense. Il existe également d’autres domaines de coopération, notamment économiques. La coopération économique est aujourd’hui plus importante pour nous que la coopération en matière de défense.

RFI/F24 : Cette élection pose question. Êtes-vous déterminé à ne briguer qu’un ou deux mandats ou, comme certains le craignent, une « dynastie Deby » s’installe-t-elle ?

Tout d’abord, il faut savoir que je suis candidat et que j’ai un programme ambitieux que je vais présenter au peuple tchadien.

Ensuite, c’est au peuple tchadien de décider, même si je suis confiant. J’ai confiance en mon programme au regard de tout ce que j’ai fait, en termes de respect des engagements que j’ai pris pour la transition : notamment organiser un dialogue national inclusif et un référendum constitutionnel.

Le peuple tchadien sait que je suis un homme d’action et un homme de parole. Si je suis élu, je ferai mon quinquennat et à la fin de mon mandat, ce sera au peuple de me juger…

Quant à une dynastie, notre constitution est très claire : un candidat ne peut pas exercer plus de deux mandats successifs.

Je voudrais rassurer le peuple tchadien que moi et tout le monde respecterons la constitution qui a été adoptée et votée par le peuple tchadien.


Cette interview a été éditée à partir de la version originale française pour plus de longueur et de clarté.

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