La France prépare une législation pour rationaliser les projets de centrales nucléaires
La France prépare une législation visant à réduire les formalités administratives liées aux projets nucléaires et vise à lancer la construction de son premier réacteur EPR2 de nouvelle génération avant mai 2027, a déclaré un responsable du ministère de l’Énergie. Le président Emmanuel Macron a annoncé en février son intention de construire au moins six réacteurs EPR2, ainsi que la possibilité de huit réacteurs supplémentaires, avec un premier projet à partir de 2028 et une première mise en service d’ici 2035.
Le gouvernement cherche maintenant à minimiser les processus bureaucratiques impliqués. Le projet de loi, qui sera présenté en Conseil des ministres avant le lancement d’un débat public fin octobre, simplifiera les procédures et réduira le risque de multiples oppositions judiciaires.
« L’objectif est que le volet procédural et les autorisations durent moins de cinq ans et que les travaux de construction du premier EPR2 commencent avant la fin du mandat présidentiel, avant mai 2027 », a déclaré le responsable du ministère aux journalistes. « Le dernier calendrier … prévoit que les opérations commerciales de ce réacteur commenceront à partir de 2035-36. »
Le projet de loi a déjà rencontré l’opposition de groupes environnementaux.
Pauline Boyer de Greenpeace France note : « Le gouvernement propose une loi pour accélérer l’installation de nouveaux réacteurs nucléaires avant toute concertation avec la population ! C’est un détournement démocratique. Greenpeace a déclaré qu’il ignorerait tout processus de consultation publique lié à la construction de nouvelles centrales nucléaires. « La seule chose que ce projet de loi accélérera, c’est la régression du droit de l’environnement », a déclaré Boyer dans un communiqué.
Un rapport publié par Matignon en février a estimé le coût total de construction de six EPR2, dans un scénario médian et sur la base d’une mise en service du premier réacteur d’ici 2037, à 51,7 milliards d’euros (49,8 milliards de dollars). L’énergéticien EDF a l’intention de construire les réacteurs sur trois sites nucléaires existants : deux à Penly, dans le département administratif de la Seine-Maritime, deux à Gravelines, dans le nord de la France, et deux soit au Bugey, dans l’est de la France, soit au Tricastin, dans le Sud de la France.
Cependant, EDF fait actuellement l’objet d’une refonte de sa gouvernance et d’une nationalisation complète. En août, il a émis un cinquième avertissement sur les bénéfices pour l’année et s’attend désormais à ce qu’une baisse de la production réduise son bénéfice de base de 29 milliards d’euros en 2022.
De plus, le parc nucléaire français a fait l’objet d’un examen minutieux, avec une vague de réparations de centrales qui a forcé un nombre record de réacteurs à s’arrêter et a envoyé la puissance nucléaire à son plus bas niveau depuis 30 ans, aggravant gravement la crise énergétique en Europe. Sur les 56 réacteurs du groupe, 26 sont actuellement à l’arrêt pour des raisons de maintenance, de corrosion ou de rechargement.
Le directeur exécutif d’EDF, Cédric Lewandowski, a déclaré le 14 septembre devant la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale que, en théorie, cinq devraient redémarrer en septembre, cinq en octobre, sept en novembre, trois en décembre, trois en janvier et deux en février. « EDF s’est engagé à redémarrer tous les réacteurs arrêtés pour cet hiver », a déclaré Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique, devant le conseil de défense de l’énergie le 2 septembre. Cependant, la plupart des experts ne pensent pas que cela soit faisable compte tenu des nombreux problèmes auxquels EDF est confronté, comme l’arrêt prolongé et non planifié de quatre réacteurs le 25 août, pour des problèmes de corrosion.
Pour mener à bien ce plan, le nouveau PDG d’EDF, Luc Rémont, devra faire face à une pénurie de main-d’œuvre qualifiée, qui contribue à retarder la relance du parc nucléaire, souligne Le Monde. Face au manque de soudeurs, tuyauteurs, machinistes et chaudronniers industriels, EDF devra recruter des ouvriers en Roumanie, au Portugal ou ailleurs, et il leur faudra 2 à 3 ans de formation.
L’EPR2 est un concept de troisième génération réalisé par Framatome et EDF. Il s’agit d’une version « optimisée » de la conception de l’EPR de 1,7 GWe, qui a rencontré des problèmes de jeunesse. Les deux premiers projets à Flamanville en Normandie et à Olkiluoto en Finlande ont tous deux subi de longs retards et des dépassements de coûts. Cependant, deux autres réacteurs EPR ont été achevés à l’usine de Taishan dans le Guangdong, en Chine, et sont entrés en service en 2018 et 2019.
Image : Rendu de l’îlot nucléaire EPR2 (avec l’aimable autorisation d’EDF)