La France panique face au projet de vente du fabricant de paracétamol à un fonds américain
PARIS — Le géant pharmaceutique français Sanofi a annoncé vendredi qu’il était en pourparlers pour vendre une participation majoritaire dans sa filiale qui produit des médicaments en vente libre à une société de capital-investissement américaine CD&R pour 15 milliards d’euros.
Le projet de rachat s’avère déjà très controversé en France, des politiciens de tous bords politiques exprimant leurs craintes qu’il pourrait menacer les emplois dans le secteur manufacturier en France et aller à l’encontre des efforts de l’Europe pour sécuriser ses chaînes d’approvisionnement en médicaments essentiels.
Quelques heures seulement après que Sanofi a annoncé qu’il était en pourparlers pour vendre la filiale Opella, dans le cadre de sa volonté de se concentrer sur les vaccins et les médicaments innovants, le gouvernement français a averti que si CD&R ne gardait pas la direction et la production de l’entreprise en France, il envisager d’utiliser ses pouvoirs de sélection des investissements et de veto.
Dans le passé, le gouvernement français n’a pas hésité à utiliser ces pouvoirs pour bloquer des rachats qu’il considérait comme dangereux, allant des supermarchés aux fournisseurs nucléaires. Un groupe de 62 législateurs centristes et conservateurs ont envoyé vendredi à Armand une lettre appelant le gouvernement à intervenir.
« Le gouvernement français mobilisera tous les outils à sa disposition, y compris ceux pour contrôler les investissements étrangers en France », ont déclaré le ministre de l’Economie Antoine Armand et le ministre de l’Industrie Marc Ferracci dans un communiqué.
Les ministres ont toutefois affirmé que l’acheteur était « sérieux ». Ils ont promis que tout accord n’aurait pas d’impact sur la production et l’approvisionnement en paracétamol et autres médicaments essentiels en France.

Malgré ces assurances, les législateurs français n’ont pas tardé à rejeter la possibilité d’un rachat par une entreprise qui verrait les boîtes jaunes omniprésentes du Doliprane, la marque du paracétamol de Sanofi, dans les mains des Américains – surtout compte tenu des centaines de millions d’euros que l’entreprise a reçus. en aides d’État. Le président français Emmanuel Macron a inauguré le mois dernier une nouvelle usine de vaccins Sanofi qui, selon lui, a bénéficié d’une aide de l’État français de 240 millions d’euros.
Le chef du Rassemblement national d’extrême droite, Jordan Bardella, a déclaré qu’il serait « incompréhensible que l’État laisse cela se produire ». Le député de gauche Eric Coquerel, qui préside la commission des finances de l’Assemblée nationale, a déclaré qu’« il est impensable de renoncer à notre souveraineté sur la production de ce type de médicaments » et a souligné que Sanofi « regorge d’argent public ».
Les législateurs du camp centriste de Macron ont également fustigé cet éventuel accord.
Ces dernières années, la France a accordé de généreuses subventions aux fabricants de médicaments dans le but de relocaliser la production de médicaments nationaux, en particulier de paracétamol, après l’apparition de pénuries critiques pendant la pandémie de coronavirus. en raison d’une dépendance mondiale à l’égard de fournisseurs étrangers. En parallèle, la Commission européenne travaille sur une loi sur les médicaments critiques afin de réduire la dépendance de l’Europe à l’égard des autres pays en matière de médicaments.