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« La France freine pathétiquement la restitution de l’art à l’Afrique qui est inévitable »

TLe chemin de la restitution est pavé de bonnes intentions. Tout le monde s’accorde à dire qu’un pays doit restituer les œuvres d’art volées ou pillées. Mais la réalité est différente, du moins pour la France, qui a longtemps été à l’avant-garde sur ce sujet et qui est aujourd’hui à la traîne. Pour preuve, un projet de loi-cadre visant à faciliter les restitutions, qui devait être soumis au Parlement en avril mais a ensuite été reporté à l’automne, pourrait être reporté aux sine die.

Le sujet de discorde est l’Afrique, avec un constat plus que consternant : 90 % de son patrimoine culturel se trouverait en dehors du continent, une grande partie en Europe, notamment parmi les anciennes puissances coloniales. La France, par exemple, possède 90 000 objets d’Afrique subsaharienne, dont 70 000 sont conservés rien qu’au musée du quai Branly à Paris.

Quand Madonna adopte une coiffure tressée ou que Rihanna pose avec une couronne Néfertiti, Internet se déchaîne, dénonçant « l’appropriation culturelle ». Mais le fait que l’Occident se soit approprié le patrimoine africain n’émeut presque personne. Pour que les choses changent, il a fallu que le président Emmanuel Macron tape du poing sur la table à Ouagadougou en 2017, promettant de promouvoir les restitutions à l’Afrique ; son discours a en fait secoué toute l’Europe.

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Un rapport de 2018 de la Bénédicte Savoy et du Sénégalais Felwine Sarr appelait à des restitutions massives aux pays africains. En 2021, la France a restitué au Bénin 26 objets du trésor d’Abomey que ses troupes avaient pillés. C’est la première restitution réussie obtenue par un pays africain, mais elle aurait pu être plus substantielle.

Mais depuis, les choses ont ralenti. Après tout, pour restituer, il faut contourner une règle à toute épreuve : l’inaliénabilité des collections publiques. Deux lois de restitution votées en 2023, l’une concernant les biens spoliés sur les Juifs et l’autre visant à restituer les restes humains vers les pays d’origine, ont enfreint cette règle au nom d’une « raison impérieuse » et d’un « intérêt général majeur ».

Une histoire douloureuse

En revanche, le troisième projet de loi, qui vise à encourager la restitution à l’Afrique, ne comporte aucune raison impérieuse. Comme l’a rapporté pour la première fois Le Mondele projet actuel a été écarté car le Conseil d’Etat, qui a conseillé le gouvernement sur le projet de loi, a estimé que l’inaliénabilité devait primer.

Et pourtant, ce principe était facile à trouver : on l’appelle « colonisation ». Il faut reconnaître que le contexte politique a biaisé l’acquisition d’une très grande quantité d’objets africains en France, dont les deux tiers proviennent de la période coloniale. Le sujet reste explosif et tabou et implique le repentir.

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