La France est à un tournant historique et elle l’a déjà vécu

Bien sûr, une différence essentielle entre la Troisième République naissante et la Cinquième République vieillissante est que, cette fois-ci, il y a trois blocs politiques et idéologiques, et non deux. Mais si le parti Renaissance de Macron a fait mieux que prévu, comme l’a rapporté Le Monde, le Premier ministre Gabriel Attal a réussi à sauver les meublesou sauver ce qu’il peut de la débâcle de Macron, le parti semble voué à une mort-né plutôt qu’à une renaissance.

C’est une toute autre histoire avec les deux autres blocs, en revanche.

Bien que le Rassemblement national n’ait pas obtenu, comme le prédisaient les sondeurs, la majorité absolue ou même relative, il a néanmoins augmenté sa part de voix, mais ouides sommets sans précédent, de 9 millions au premier tour à plus de 11 millions au second. Le parti de Marine Le Pen ressemble aussi de loin à l’Ordre Moral par sa réaction allergique aux idéaux de liberté, d’égalité et de fraternité de 1789 ainsi que par son mélange bonapartiste de régime autoritaire et de patine démocratique par le recours au référendum.

En 1877, l’ancien général bonapartiste Patrice de Mac-Mahon dissout la législature nouvellement élue avant de convoquer de nouvelles élections, confiant dans le retour à la raison de l’électorat français. | Creative Commons via Wikimedia

Enfin, et c’est là que réside la principale similitude, le Nouveau Front populaire est sur le point de remporter une victoire qui, tout comme celle des républicains de Gambetta il y a un siècle et demi, a le potentiel de transformer le cours de l’histoire française. En effet, elle pourrait transformer ce qui était en fait une monarchie républicaine établie par Charles de Gaulle en 1958 en une république parlementaire imaginée, mais pas pleinement réalisée, par Gambetta en 1877.

Peu après l’annonce des résultats du second tour, qui ont surpris tout le monde, y compris ses propres dirigeants et ses militants, Attal a déclaré que le centre de gravité serait désormais plus que jamais entre les mains du Parlement. Et c’est précisément là que les quatre partis qui composent la coalition socialiste, écologiste, communiste et France insoumise ont longtemps insisté pour que le pouvoir se trouve.

Il reste cependant des forces redoutables, externes et internes, à vaincre, et elles commencent toutes deux par la lettre M : Macron, d’un côté, utilisera les pouvoirs dont il dispose, à commencer par sa liberté de choisir qui il souhaite pour former un nouveau gouvernement, pour saper le processus. De l’autre, le leader inflexible de la France rebelle, Jean-Luc Mlenchon, utilisera son influence pour empêcher les compromis nécessaires à la formation d’un gouvernement efficace.

Les enjeux ne pourraient être plus élevés. Comme l’a résumé Clémentine Autain, l’éloquente ex-membre de Defiant France et éminente critique de la tendance autoritaire de Mlenchon, le défi auquel la coalition est confrontée : « Le Nouveau Front populaire se trouve désormais au pied du mur et doit se restructurer pour maintenir l’espoir qu’il a inspiré. Si cette coalition s’effondre, nous manquerons au devoir historique qui nous a été confié. »

Près d’une semaine s’est écoulée depuis l’avertissement d’Autain, mais le Nouveau Front populaire n’a toujours pas trouvé de candidat au poste de Premier ministre. Et alors que la France s’approche de ce tournant historique, elle est désormais confrontée au risque de voir ses dirigeants de coalition ne pas suivre son exemple.

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