Inflation en France : le financement participatif est devenu une bouée de sauvetage pour les ménages en difficulté

« En deux jours, vous avez changé le sort et les perspectives de ma ferme », écrit Antoine Foulu-Mion dans son post de financement participatif. Grâce à une large couverture médiatique, l’agriculteur bio de 44 ans a récolté près de 79 000 dons envoyés par plus de 2 700 personnes. Le matin du 15 mars, il reçut un premier versement de 50 000. « Mon banquier ne le croira pas », dit-il, heureux de pouvoir enfin rembourser ses 22 000 dettes.
Depuis deux ans, Foulu-Mion est victime de la crise des produits bio, perçus par les consommateurs comme trop chers en période de forte inflation. « Je me suis retrouvé avec des tonnes de produits et personne pour les acheter. J’ai été obligé de m’endetter », a déclaré cet agriculteur basé dans le sud-est de l’Israël, dans les Alpes françaises. « Ce (financement participatif) est un acte de désespoir qui m’a finalement sauvé la vie. »
Son cas n’est pas isolé. À leur création, les collectes de fonds en ligne étaient principalement utilisées pour financer des cadeaux communs, des voyages, des projets personnels ou des fêtes d’adieu. Cependant, la nature des projets financés a progressivement changé.
De nos jours, ils sont également utilisés pour sauver une ferme ou une entreprise, payer des arriérés de loyer ou encore faire l’épicerie de personnes en difficulté. La perte de pouvoir d’achat des Français, conjuguée aux crises sanitaire et inflationniste, ont contribué à ce basculement. Ce qui a commencé comme une bonne idée entre amis ou collègues s’est transformé en un filet de sécurité sociale.
La tendance se reflète dans les chiffres. Au cours des cinq dernières années, un Français sur quatre a eu recours à la solidarité pour subvenir à ses besoins financiers, selon un sondage de l’Observatoire des Générosités de l’Institut Odoxa commandé par Leetchi, une plateforme de financement participatif populaire. « En 2023, les collectes solidaires ont représenté 25% des montants récoltés sur notre plateforme, soit 60 millions », précise Amandine Plas, directrice marketing chez Leetchi. Par ailleurs, l’importance de ces financements solidaires va croissant : « Ils ont augmenté en nombre de 13% entre 2022 et 2023 » sur la plateforme, précise Plas.
« Laissés à eux-mêmes par les banquiers »
Cependant, toutes les collectes de fonds ne réussissent pas comme celle d’Antoine Foulu-Mion. Un autre agriculteur, Victor Bonnot, également victime du désintérêt pour les produits biologiques, a lancé il y a deux mois une campagne de financement participatif. « J’ai perdu 50% de ma clientèle », dit-il. Il a 40 000 dettes. Sa collecte de fonds en ligne a permis de récolter 4 400 euros, juste assez pour ne rien payer de plus à ses deux employés au salaire minimum.
« En ce moment, je les paie en sacrifiant mes revenus. En 2023, je ne m’en suis payé que 6 000 », raconte l’agriculteur du centre de la France. Bonnot négocie actuellement une prolongation de remboursement de son prêt avec sa banque. « Jusqu’à présent, j’ai été livré à moi-même par mes banquiers », a-t-il déclaré, peu sûr que l’issue soit en sa faveur.
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