Xi se rend en Europe pour défendre les relations avec la Russie
Pékin (AFP) Xi Jinping se rend dimanche en Europe pour défendre l’alliance « sans limites » de la Chine avec la Russie, d’abord auprès de la France, principal soutien de l’Ukraine, puis auprès de la Serbie et de la Hongrie, qui entretiennent des liens étroits avec le Kremlin.
La deuxième économie mondiale cherche à approfondir ses liens politiques et économiques en Europe pour contrebalancer ses relations difficiles avec son rival Washington.
Mais les analystes affirment que si la France et d’autres alliés de l’Ukraine en Europe croient que Xi peut être persuadé d’abandonner son amitié avec le président russe Vladimir Poutine, ils seront déçus.
Malgré l’accueil du président français Emmanuel Macron sur le tapis rouge pour Xi à son arrivée dimanche, leurs entretiens seront loin d’être simples.
Lundi à Paris, Xi et Macron s’entretiendront avec la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui a exhorté Pékin à jouer un rôle plus important pour mettre fin à la guerre en Ukraine.
« Si la partie européenne s’attend à ce que la Chine impose des sanctions à la Russie, ou qu’elle se joigne aux Etats-Unis et à l’Europe pour imposer des sanctions économiques à la Russie, je pense qu’il est clairement peu probable que cela se produise », a déclaré Ding Chun, directeur du Centre d’études européennes de l’Université de Shanghai. Université Fudan.
Xi cherche à repousser les récentes enquêtes de l’Union européenne sur l’industrie chinoise, mais la France a clairement indiqué que la guerre menée par la Russie en Ukraine serait « en premier lieu » à l’ordre du jour.
La Chine prétend être une partie neutre en Ukraine mais n’a jamais condamné l’invasion russe, tandis que les États-Unis ont déclaré que Moscou aurait du mal à poursuivre sa guerre sans le soutien de Pékin.
Pékin est « l’acteur international disposant du plus grand levier pour faire changer d’avis Moscou », a déclaré à l’AFP un diplomate français sous couvert d’anonymat.
« Paris mettra le soutien de la Chine à la Russie au cœur de la discussion », a déclaré Abigael Vasselier, de l’Institut Mercator d’études chinoises.
« Cela ne sera certainement pas propice à un moment de bien-être, malgré l’optique. »
Jusqu’où ira Xi ?
La visite de Xi en Europe sera la première depuis la fin de l’isolement de la Chine face au Covid.

Cela survient également un an après que Macron a effectué une visite d’État en Chine en avril 2023, au cours de laquelle il a déclaré qu’il comptait sur Xi pour « ramener la Russie à la raison » sur l’Ukraine.
À l’époque, Macron avait exaspéré les alliés européens en affirmant que le bloc ne devrait pas être entraîné dans un conflit entre la Chine et son principal rival, les États-Unis, à propos de Taiwan – tout en gagnant les éloges de Pékin pour ses commentaires.
En février de cette année, le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi s’est rendu en France et a déclaré à Macron que Pékin appréciait sa « politique étrangère indépendante ».
« Nous verrons jusqu’où ira Xi Jinping pour plaire à Emmanuel Macron », a déclaré Valérie Niquet, de la Fondation pour la recherche stratégique.
Après avoir terminé son voyage en Europe, Xi retournera en Chine, et Poutine devrait s’y rendre plus tard en mai.
« La Chine ne bougera pas sur l’Ukraine », a déclaré Niquet.
‘Prix à payer’
Alors que Macron et von der Leyen chercheront à se concentrer sur l’Ukraine, Xi voudra lutter contre une série d’enquêtes lancées par le bloc sur des pratiques commerciales déloyales présumées de la Chine.
Les enquêtes couvrent toute la gamme de la production industrielle chinoise, depuis les subventions aux panneaux solaires et aux véhicules électriques, jusqu’aux achats dans le secteur des dispositifs médicaux.
Pékin a qualifié ces mesures de « protectionnisme ».
« La partie chinoise est très désireuse de mettre cela sur la table, mais la France est derrière les projets de la Commission européenne », a déclaré à l’AFP Philippe Le Corre, du Center for China Analysis de l’Asia Society Policy Institute.
« Il est temps pour les dirigeants européens d’expliquer à la Chine que le prix à payer pour son soutien croissant à l’effort de guerre de la Russie va augmenter », a déclaré Vasselier de l’Institut Mercator.
« Ouverture à l’Est »
Depuis la France, Xi se rendra en Serbie, puis en Hongrie du 8 au 10 mai.

La visite à Belgrade, la capitale serbe, coïncidera avec l’anniversaire de l’attentat à la bombe américain contre l’ambassade de Chine en 1999, ce qui permettra à Xi d’envoyer un message anti-occidental pointu.
La Chine a investi massivement pour étendre son empreinte économique en Europe centrale et orientale, notamment de vastes usines de fabrication de batteries et de véhicules électriques (VE) en Hongrie, ainsi que des opérations de cuivre et d’or en Serbie.
« Le projet de commémoration du (…) bombardement de l’ambassade de Chine par l’OTAN (…) ouvre également la voie à la visite de Poutine en Chine : l’OTAN constitue une menace pour la sécurité internationale », a déclaré Wang Yiwei, directeur du Centre d’études sur l’Union européenne à Université Renmin de Chine.
À Budapest, il rencontrera le Premier ministre Viktor Orban, un nationaliste déclaré qui s’oppose à la position officielle de l’UE sur la Russie.
Orban défend une politique étrangère d’« ouverture à l’Est » depuis son retour au pouvoir en 2010, cherchant à resserrer les liens économiques avec la Chine, la Russie et d’autres pays asiatiques.
Malgré sa petite taille, ce pays d’Europe centrale de 9,6 millions d’habitants a attiré un flot de grands projets chinois ces dernières années.
Orban a parlé le mois dernier de sa vision d’un « monde souverainiste », où « l’économie mondiale est organisée de manière non idéologique selon des principes d’avantages mutuels ».
2024 AFP