Un faux pas de la France ?

Dans cet article, Nadine Walton commente les récents changements apportés aux règles de succession françaises et les implications potentielles pour les particuliers britanniques détenant des actifs en Europe. Les conséquences pour les clients domiciliés en anglais sont particulièrement examinées.

En novembre 2021, la France a introduit une nouvelle règle relative à la succession qui semble contrevenir à un règlement clé de l’UE publié en la matière. Ce règlement est le règlement européen sur les successions 650/2012, plus communément appelé « Bruxelles IV » ou « règlement européen sur les successions ».

Bruxelles IV et la quête d’harmonisation

Bruxelles IV est entré en vigueur en août 2015. Son objectif était d’introduire des règles garantissant que la succession de toute personne décédée soit traitée conformément à la loi du une seule juridiction (UE)quel que soit l’endroit où les actifs de la succession peuvent être situés dans les pays de l’UE.

Sous Bruxelles IV, les individus peuvent choisir que la loi de leur nationalité s’applique pour déterminer la succession à l’ensemble de leur succession. Dans le cas contraire, la loi de la juridiction dans laquelle ils ont leur « résidence habituelle » sera réputée s’appliquer automatiquement à leur succession.

A titre d’exemple, un ressortissant anglais résidant en Espagne, détenant exclusivement des biens « espagnols », pourrait néanmoins prescrire par testament que la loi d’Angleterre et du Pays de Galles s’applique à la succession de l’ensemble de sa succession.

Les implications en pratique

L’effet de Bruxelles IV est important et peut sembler particulièrement remarquable lorsqu’il est examiné à travers le prisme d’un avocat qualifié « anglais ».

Cela tient au fait que l’Angleterre et le Pays de Galles restent l’une des seules juridictions en Europe qui n’impose pas de règles d’« héritage forcé ». Au lieu de cela, le principe de la liberté testamentaire règne en maître. Les conjoints et les enfants d’une personne décédée n’ont pas automatiquement droit à une partie de la succession.

Bien que le Royaume-Uni ait désormais quitté l’UE, l’impact du règlement européen sur les successions reste inchangé.

En termes simples, lorsqu’un choix valide de loi « anglaise » (ou, en fait, écossaise) a été fait par un individu, les tribunaux ici sont empêchés de s’en remettre aux règles de succession dans toute juridiction étrangère de l’UE. C’est le cas, que la propriété du domaine soit située en France, en Espagne ou dans tout autre pays qui a tendance à bénéficier de climats plus ensoleillés et d’un meilleur vin.

La loi valablement « choisie » par l’individu doit être appliquée.

Donc, si vous êtes un ressortissant anglais et que vous ne voulez pas que vos enfants héritent de votre villa toscane avant que votre partenaire n’y ait fini ses jours, vous avez de la chance*. (* Sous réserve que nous rédigions les dispositions appropriées dans votre testament et que nous vous conseillions sur les réclamations potentielles qu’ils pourraient faire. Ne faites pas cela s’il vous plaît ; cette villa toscane est trop précieuse pour justifier le risque.)

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Le chat et les pigeons sont deux mots dont je me souviens à peu près du niveau A en français. Et le premier, semble-t-il, est très présent parmi les seconds.

En novembre 2021, la France a mis en place de nouvelles règles au niveau national qui dictent que : –

(i) lorsqu’une personne décédée ou l’un de ses enfants est ressortissant ou résident d’un État membre de l’UE ; et

(ii) la loi (non française) applicable à la succession de la succession ne protège pas une partie spécifique de la succession pour les enfants du défunt

alors les enfants pourront être indemnisés sur tout bien détenu en France.

Non seulement cela, mais la France a en fait imposé une obligation aux notaires en vue de donner du mordant à la nouvelle règle. Lorsqu’un notaire s’aperçoit désormais que les héritiers ne sont pas protégés par le projet de répartition de la succession, la loi française lui impose d’informer activement ces héritiers de leurs droits à la part réservataire.

Ainsi, sur cette base, un ressortissant anglais jouissant de sa retraite dans son gîte à Bordeaux pourrait encore préparer un testament anglais, faisant un choix de loi anglaise, déshéritant ses enfants. Pourtant, les règles françaises compromettraient le contenu de ce testament et l’application du droit anglais (qui met l’accent sur la liberté testamentaire) dans le processus.

Cela semble en totale contradiction avec Bruxelles IV.

Mais pourquoi, et maintenant ?

L’opinion générale semble être que les nouvelles règles ont été introduites en France spécifiquement pour prévenir une « iniquité » perçue dans le cas de testaments conformes aux principes de la charia. Via ces documents testamentaires, les héritiers masculins bénéficient généralement plus que leurs homologues féminins.

La règle française a cependant des effets potentiellement beaucoup plus larges, comme illustré ci-dessus. Elle menace d’affecter toute succession dans laquelle le défunt ou ses descendants ont un lien avec un État membre de l’UE.

Selon des informations, la Commission européenne a ouvert une enquête sur la compatibilité de la nouvelle règle avec le règlement européen sur les successions. La conclusion de cet examen, et la rapidité avec laquelle il sera atteint, reste à voir. En réalité, il se peut que ce ne soit que lorsqu’une affaire pertinente contestant une distribution en vertu de la règle se rend jusqu’à la Cour européenne de justice que nous sommes mieux placés pour comprendre le poids qui sera accordé à la règle française.

En attendant, il demeure important de s’assurer que votre planification successorale est bien gérée. Profitez-en pour vous assurer que vous avez fait un « choix de loi » valide dans votre testament, qui demeure la déclaration la plus solide que vous puissiez faire pour déterminer votre régime successoral. Et ne regarde pas ta volonté dans un splendide isolement. Tenez compte de votre propre résidence, des liens familiaux avec d’autres juridictions et de toute planification à vie que vous pourriez souhaiter entreprendre à l’avenir, ainsi que des implications fiscales de tout ce qui précède. Nous travaillons couramment sur des questions multi-juridictionnelles et avons donc une compréhension des outils utilisés (en France ainsi que dans d’autres juridictions de l’UE) pour atténuer les effets des dispositions inflexibles sur l’héritage forcé pour le domicile anglais.

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