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Tout ne va pas bien dans la France de Macron

Le rapport des élites françaises à leur patrie est très différent de celui de leurs homologues anglais. L’Angleterre est peut-être le seul grand pays dont les intellectuels ont honte de leur propre nationalité, écrivait George Orwell en 1945. Ce sentiment dérisoire perdure aujourd’hui parmi les élites urbaines britanniques.

Les élites françaises, en revanche, même si elles peuvent être très critiques envers leur pays entre elles, n’hésitent pas à exalter son statut à l’étranger. Le nationalisme français, né de la Révolution française, n’a été adopté par la droite qu’un siècle plus tard. Dès lors, le patriotisme de base franchit les frontières politiques.

Alors que la position de la Grande-Bretagne n’est pas rose, Frances n’est certainement pas meilleure

La francofilia d’élite a longtemps été une facette du snobisme anglais. Orwell fait référence à la vision romantique de l’auteur catholique GK Chesterton de la France comme une terre de paysans catholiques chantant sans cesse la Marseillaise autour de verres de vin rouge. Pas de mal à cela jusqu’à ce que ce romantisme s’étende à une énorme surestimation de la puissance militaire française après la Première Guerre mondiale. Orwell a conclu qu’il y avait les ordures romantiques qui [Chesterton] écrit habituellement sur la France et l’armée française avait été écrit par quelqu’un d’autre sur la Grande-Bretagne et l’armée britannique, il aurait été le premier à se moquer.

En écoutant la BBC ces jours-ci et en passant à la radio publique française, le contraste est saisissant. L’un est un hymne dépressif constant sur les malheurs du Royaume-Uni ; l’autre analyse de façon critique les problèmes de France, mais d’un ton optimiste. Pourtant, on pourrait s’attendre à l’inverse.

Prenez une statistique brute. En 2021, les classements du PIB (nominal) de la Banque mondiale et des Nations Unies placent le Royaume-Uni au 5e et France 7e. Les estimations du Fonds monétaire international pour 2022 montrent que l’Inde dépasse le Royaume-Uni pour revendiquer le 5e spot pour le PIB mondial, mais avec la France toujours 7e.

On peut s’interroger sur la fiabilité du PIB en tant que comparateur, mais une foule d’autres mesures montrent régulièrement que la France est moins bien lotie que le Royaume-Uni. Les ratios dette/PIB montrent la France à environ 115 %, le Royaume-Uni à 99,6 %. Pendant ce temps, la Banque des règlements internationaux donne à la France la dette publique et privée totale (non financière) à 351 % ; le Royaume-Uni à 271 %.

On peut à juste titre pointer vers la baisse actuelle de l’inflation en France à 7,1 % (UE harmonisée) par rapport à 10,7 % au Royaume-Uni. Mais comme le montrent les statistiques de la dette française ci-dessus, le président Emmanuel Macron a commencé à faire baisser l’inflation intérieure en subventionnant les prix lors de sa campagne électorale présidentielle de 2022. Le chômage français à 7,4 pour cent se compare défavorablement aux 3,4 pour cent du Royaume-Uni. Pendant ce temps, la France est l’État de l’OCDE et de l’UE le plus taxé, ce qui laisse peu de marge de manœuvre. Ses chiffres de balance des paiements sont aussi sombres que ceux du Royaume-Uni, ainsi que sa croissance économique stagnante.

Alors que la position de la Grande-Bretagne n’est pas rose, Frances n’est certainement pas meilleure. C’est pourquoi les prédictions récentes d’une certaine presse européenne, notamment française, reprise par les élites britanniques, selon lesquelles le Royaume-Uni s’enfonçait dans un déclin terminal ont perdu toute proportion. Si la presse française apprécie une touche de schadenfreude aux dépens du vieil ennemi, et les politiciens français sont heureux de détourner l’attention de leurs propres problèmes, la volonté d’une grande partie de la classe moyenne britannique d’avaler le même point de vue ne peut s’expliquer que par une habitude culturelle enracinée aggravée par le ressentiment post-Brexit. Aujourd’hui, avec Macron totalement attaché au projet européen, la France pour les élites britanniques est ipso facto supérieur à la Bretagne. Pourtant, l’état moral de France est alarmant.

Depuis les élections présidentielles et législatives de 2022, le parti centriste de Macron n’a plus de majorité absolue. La France est dans l’impasse et dérive vers une politique toujours plus radicale. La première ministre de Macron, Lisabeth Borne, incapable de disposer d’une majorité à l’Assemblée nationale, peine à obtenir ses affaires autrement que par le tour de passe-passe constitutionnel de l’article 49,3, qui guillotine le débat parlementaire. La chambre étant divisée en quatre, la question demeure de savoir si Macron finira par dissoudre le Parlement. Les sondages d’opinion suggèrent que ce serait un cadeau pour le parti Marine Le Pens, déjà le plus grand parti d’opposition avec 89 sièges. La France pourrait alors en venir à reproduire l’actuel gouvernement italien de droite radicale.

Socialement et culturellement la société française est loin d’être saine. Outre l’aggravation de la violence et de l’anarchie dans le banlieues commodément à l’abri des regards des élites anglaises visite en France le modèle français d’assimilation et lacite est testé jusqu’à la destruction. Les statistiques officielles du ministère de la Justice pour juillet 2021 montrent que 24,6 % de la population carcérale est étrangère (le double de la proportion en Grande-Bretagne). Le ministre français de l’Intérieur a déclaré publiquement cet été que bien que les étrangers représentent 7,4 % de la population française, ils représentent 19 % de la délinquance nationale, et que 48 % des délinquants arrêtés à Paris sont des étrangers, 55 % à Marseille, 39 % à Lyon.

Pendant ce temps, l’hostilité à l’interdiction du foulard en France, et la perspective de son extension, provoquent un ressentiment croissant et au moins un défi passif envers lacite et la République à partir d’éléments de la communauté musulmane française. L’image générale est celle d’une France peu à l’aise avec elle-même. La perspective qu’un membre des minorités ethniques françaises dirige le pays sans faire d’histoires dans un avenir proche, comme cela vient de se produire en Grande-Bretagne, semble impossible. En effet, le romancier à succès de France, Michel Houellebecq, pressenti pour le prix Nobel de littérature cette année en 2015, a écrit un tel scénario dans un mélange d’appréhension et d’anxiété nationales.

Des sections de l’élite britannique déprécient depuis longtemps leur pays. Dans les années 1930, Orwell fustigeait l’intellectuel anglais pour son attitude antibritannique mécanique. Mais il suggéra un remède :

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PRÉTENDRE

L’intellectuel de Bloomsbury, avec son ricanement mécanique, est aussi démodé que le colonel de cavalerie. Une nation moderne ne peut se permettre ni l’un ni l’autre. Patriotisme et intelligence devront à nouveau se conjuguer.

S’ils veulent y parvenir, comme la direction du parti travailliste semble désormais espérer que les élites britanniques de gauche ne feraient pas mieux que de se tourner vers leurs homologues français, qui parviennent à combiner la critique des échecs de leur pays avec un engagement pour son succès. et la défense de ses valeurs fondamentales.

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