Nouvelle-Calédonie : la violence éclate après l’arrestation de militants par la France – BBC News
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- Auteur, Malu Cursino
- Rôle, nouvelles de la BBC
Les manifestations ont éclaté en Nouvelle-Calédonie après que sept militants indépendantistes ont été arrêtés et emmenés en France pour leur rôle présumé dans l’orchestration d’émeutes contre un projet de loi controversé sur la réforme du vote.
Une mairie, un commissariat et plusieurs autres bâtiments ont été incendiés à travers la Nouvelle-Calédonie, a indiqué le haut-commissariat de France pour le territoire du Pacifique Sud.
Parmi les personnes transportées par avion vers la France métropolitaine se trouvait le leader indépendantiste Christian Tein, qui a été inculpé samedi pour des émeutes, des pillages et des incendies criminels au cours desquels neuf personnes ont été tuées.
Les violences ont éclaté à cause du projet visant à étendre le droit de vote aux personnes résidant dans le territoire d’outre-mer depuis plus de 10 ans. Le président français Emmanuel Macron s’est ensuite rendu en Nouvelle-Calédonie et a suspendu les réformes proposées pour permettre « un retour à l’ordre ».
Le haut-commissariat français de Nouvelle-Calédonie a déclaré que des troubles généralisés ont commencé dimanche soir et ont nécessité l’intervention « rapide et déterminée » des forces de l’ordre et des pompiers en divers endroits.
Des incendies ont été déclenchés dans la capitale, Nouma, tandis qu’à l’extérieur de la ville, à Dumba, des locaux et des véhicules de la police ont été incendiés, a indiqué le haut-commissariat.
A l’extrémité nord de l’île principale, une mairie de Koumac a été incendiée mais « rapidement maîtrisée ».
Trente-huit personnes ont été arrêtées lundi, selon un communiqué distinct du haut-commissariat. Au total, 1.493 personnes ont été interpellées depuis le début des tensions dans l’archipel.
Les pompiers de Nouvelle-Calédonie ont lancé un appel aux dirigeants locaux pour permettre un retour au calme. « Malgré le dévouement des pompiers, la violence s’est intensifiée parmi les jeunes », a déclaré le porte-parole du syndicat, Gwenval Cambon, au journal local Les Nouvelles Calédoniennes. Les véhicules et institutions municipales sont de plus en plus attaqués.
De nombreuses écoles ont été fermées lundi et la vice-présidente de la Nouvelle-Calédonie, Isabelle Champmoreau, a déclaré que son gouvernement travaillait sur un plan visant à garantir qu’un plus grand nombre d’élèves puissent reprendre leurs études en toute sécurité.
La France a colonisé la Nouvelle-Calédonie en 1853 et en a fait un territoire d’outre-mer en 1946, accordant des droits aux autochtones Kanak.
Aujourd’hui, la Nouvelle-Calédonie compte environ 300 000 habitants, dont 112 000 Kanaks.
Dans l’état actuel des choses, le vote sur le territoire est réservé aux Kanaks et à ceux arrivés de France avant 1998.
Mais la réforme prévue, actuellement suspendue, permettrait à davantage de résidents français – y compris toute personne résidant en Nouvelle-Calédonie depuis au moins 10 ans – de voter. Depuis 1998, plus de 40 000 ressortissants français se sont installés dans l’archipel.
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La Cellule de coordination des actions sur le terrain (CCAT) a demandé la libération immédiate et le retour des sept militants transportés par avion vers la France, à quelque 17 000 km (10 563 miles) de là. Ils devraient être interrogés sur leur rôle présumé lors des manifestations et des troubles qui ont suivi sur le territoire français.
Le CCAT a accusé la France d’attiser la violence, condamnant les « tactiques coloniales » de la France consistant à éloigner les militants de la Nouvelle-Calédonie.
M. Tein, qui dirige le CCAT, a été arrêté parce qu’il était soupçonné de délits de « criminalité organisée », selon le procureur général de Nouma, Yves Dupas. Quatre autres militants sont en détention en Nouvelle-Calédonie.
Daniel Goa, président de l’Union calédonienne, le plus grand parti politique indépendantiste, s’est dit « étonné » qu’ils aient été transportés par avion vers la France.
Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a déjà qualifié le CCAT d' »organisation de type mafieux », mais le groupe a maintenu qu’il n’était pas responsable des émeutes.
En mai, la France a déployé quelque 3 500 membres des forces de sécurité pour répondre aux troubles, qui ont forcé la fermeture temporaire de l’aéroport international de Nouma.
De nombreux Kanaks craignent que leur pouvoir politique ne soit dilué si la réforme devait avoir lieu, craignant qu’un futur référendum sur l’indépendance ne soit plus difficile à obtenir.
La décision de M. Macron de suspendre la réforme le 12 juin est intervenue quelques jours après qu’il ait convoqué des élections législatives anticipées en France en réponse à la victoire du Rassemblement national d’extrême droite aux élections européennes.