Modi en France | Une nouvelle phase de dynamisme dans les affaires extérieures de l’Inde
Entre le retour du Premier ministre Narendra Modis de sa visite d’Etat aux Etats-Unis d’Amérique et son départ la semaine prochaine pour une visite d’Etat exclusive en France, la diplomatie indienne a traversé une phase de commisération plus que de fabulation.
Deux des interlocuteurs les plus proches de Modis dans les affaires extérieures de l’Inde ont traversé de rares malheurs au cours des quinze derniers jours. Des deux, Modi s’est entretenu par téléphone avec le président russe Vladimir Poutine le 30 juin, six jours après le désamorçage d’une rébellion de la Compagnie militaire privée Wagner.
Le 27 juin, à la suite de l’assassinat par la police d’un citoyen français d’origine algérienne lors d’un contrôle de police, Paris a éclaté dans la violence, qui s’est rapidement propagée à de vastes régions du pays. Le président français, Emmanuel Macron, est confronté au plus grand défi politique de sa présidence alors que Modi met la touche finale à son itinéraire de voyage.
Le 6 juillet, Modi a rencontré Emmanuel Bonne, conseiller diplomatique de Macron, au cours de laquelle les développements en France ont figuré, dans le contexte plus large de l’engagement franco-indien. L’établissement de sécurité indien craint que Modi ne soit exposé au public pendant plusieurs heures lors du défilé du 14 juillet, où il est l’invité principal. C’est une occasion exclusive. La partie indienne espère que la situation intérieure en France se stabilisera au moment où Modi arrivera à Paris à la veille du défilé emblématique commémorant la Révolution française de 1789.
La rébellion de Wagner, qui a pris le monde par surprise, a jeté une ombre sur le sommet virtuel de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) le 4 juillet sous la présidence indienne. L’effort à New Delhi consiste maintenant à s’assurer que cela ne se reproduira pas lors de la visite de Modi à Paris en raison des récents événements en France.
L’un des dangers de la personnalisation de la diplomatie de haut niveau est que des relations importantes entre pays peuvent devenir l’otage d’équations personnelles entre leurs dirigeants. Modi est convaincu que son investissement personnel dans ses homologues peut porter ses fruits. De nombreux vétérans de l’art de gouverner contestent une telle théorie, mais l’investissement du Premier ministre dans l’occupant actuel du Palais de Lyse est un exemple remarquable de la justification de Modis dans la poursuite d’une telle politique.
Lorsque Macron a été élu président pour la première fois (en 2017), Modi ne s’est pas contenté de publier un message rituel sur Twitter ou d’envoyer une lettre personnelle et manuscrite de félicitations. Il était fasciné par l’histoire personnelle peu conventionnelle du président élu, autant que par la conviction que les relations de l’Inde avec la France devaient être raffermies. Il a dit alors le ministre des Affaires étrangères S Jaishankar à la consternation de l’establishment de la politique étrangère traditionnellement lié dans les deux pays qu’il souhaitait se rendre à Paris et rencontrer et saluer personnellement le nouveau président. Modi a été l’un des premiers dirigeants étrangers à faire appel à Macron, donnant le feu vert à une priorité séculaire des premières visites au Palais de la Lyse par les homologues européens poids lourds du nouveau président.
L’investissement a certainement porté ses fruits. Lorsque Modi devient seulement le deuxième dirigeant indien à être l’invité principal du 14 juillet, Manmohan Singh a été le premier à New Delhi, les autres prétendants à des relations plus profondes y verront un hommage particulier aux liens de la France avec l’Inde, allant bien au-delà de l’honneur de Modi. Cela peut avoir des conséquences considérables pour la quête d’autonomie stratégique de l’Inde dans un monde multipolaire réémergent qui a été détruit à la fin de la guerre froide.
Preuve de ces conséquences, le premier Dialogue spatial stratégique franco-indien qui s’est tenu à Paris le 27 juin. Le ministre des Affaires étrangères Vinay Kwatra et la secrétaire générale du ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères, Anne-Marie Desctes, ont conduit leurs délégations respectives. Il s’agit d’un dialogue unique pour les deux pays afin de créer l’un pour l’autre un espace stratégique dans les affaires mondiales en travaillant de concert.
L’Inde a des dialogues stratégiques avec un certain nombre de pays, mais aucun sauf avec la France pour créer un espace stratégique et une autonomie en politique étrangère. Le concept se développe rapidement à partir d’une initiative franco-indienne et fait des incursions trilatérales. Le 4 février, les ministres des Affaires étrangères de l’Inde, de la France et des Émirats arabes unis ont eu une longue conversation téléphonique. Le lendemain, Kwatra, qui était à Paris, a assisté à un dialogue trilatéral Inde-France-EAU. Il en est ressorti que les trois pays prendraient des mesures concrètes pour coopérer dans les domaines de la défense, de l’énergie et de l’environnement, de l’innovation et des échanges interpersonnels.
Ayant déjà consolidé leurs relations bilatérales, Modi et Macron exploreront des relations trilatérales similaires lors de leur prochain sommet. Cela marquera une nouvelle phase de dynamisme et une expansion créative dans les affaires extérieures de l’Inde.
(KP Nayar a largement couvert l’Asie occidentale et a fait des reportages depuis Washington en tant que correspondant étranger pendant 15 ans.)
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