Les pourparlers français ouvrent la voie à l’autonomie de la Corse
Le gouvernement français et les élus corses se sont mis d’accord sur un texte visant à accorder l’autonomie à l’île méditerranéenne, une région qui s’irrite souvent du gouvernement de Paris.
Publié le: Modifié:
3 minutes
Le président Emmanuel Macron a fixé en septembre un délai de six mois pour trouver un moyen de donner à l’île « une forme d’autonomie ».
Les Corses réclament depuis longtemps plus de pouvoir sur leurs propres affaires, ainsi qu’un statut officiel de leur langue et une protection contre les étrangers qui achètent des terres, deux demandes épineuses que Paris hésite à accorder.
Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin et des responsables corses ont déclaré mardi aux premières heures qu’ils s’étaient mis d’accord sur le texte à ajouter dans la constitution.
« Ce texte constitutionnel prévoit la reconnaissance d’un statut d’autonomie pour la Corse au sein de la république (française) qui prend en compte ses intérêts propres liés au fait qu’elle est une île méditerranéenne, sa communauté historique, linguistique et culturelle ayant développé des liens singuliers avec son territoire, « , lit-on en première ligne.
Darmanin a déclaré que les deux parties étaient également convenues que « les lois et réglementations peuvent être adaptées » sur l’île.
« Nous avons fait un pas vers l’autonomie » mais « il n’y a pas de séparation entre la Corse et la république », a déclaré Darmanin.
Ils n’ont fait aucune mention de l’officialisation de la langue corse, a-t-il ajouté.
Darmanin a déclaré que les électeurs inscrits en Corse seraient consultés sur ce projet, tout comme le parlement de l’île d’Ajaccio, actuellement contrôlé par les nationalistes.
« Nous sommes en demi-finale »
Le président du Conseil exécutif de la Corse, Gilles Simeoni, défenseur de l’autonomie, a salué cette « étape décisive ».
« Le principe d’un pouvoir législatif soumis au contrôle du Conseil constitutionnel » à Paris avait été clairement défini, a-t-il déclaré.
Mais il a ajouté qu’ils devaient encore peaufiner les détails du fonctionnement de cette législature régionale.
« Nous sommes en demi-finale. Nous devons encore gagner les demi-finales et la finale », a-t-il déclaré en utilisant une métaphore du football.
Une fois que le texte dans sa forme définitive aura été approuvé par le parlement corse, il sera ensuite soumis au vote de la chambre basse de l’Assemblée nationale et de la chambre haute du Sénat de droite à Paris.
Ce n’est que s’ils donnent tous deux leur feu vert qu’il passera à un vote combiné des deux chambres, au cours duquel il aura besoin des trois cinquièmes des voix pour être adopté.
Bruno Retailleau, qui dirige les sénateurs républicains de droite, a mis en garde mardi contre ce qu’il a qualifié de « mesure dangereuse à prendre ».
« Le projet de loi sur la Corse revient à inscrire le communautarisme dans la Constitution. Reconnaître une ‘communauté historique, linguistique et culturelle’ revient à reconnaître le peuple corse », a-t-il écrit sur X, ancien Twitter.
En Corse, le journal local Corse Matin a célébré ce qu’on appelle une fumée blanche signalant une future « réelle » autonomie pour l’île de quelque 350 000 habitants.
Mais tous les habitants de l’île n’étaient pas de fervents partisans de ce projet.
« Je pense toujours que l’octroi du pouvoir législatif est un problème, mais je n’assumerai pas le rôle d’exécuteur de ce processus », a déclaré Jean-Martin Mondoloni, député de l’opposition de droite à l’Assemblée de Corse.
Langue en danger
La Corse est devenue une priorité de l’agenda politique français en 2022 lorsque de vastes manifestations ont éclaté sur l’île suite à l’assassinat dans une prison du continent de l’éminente personnalité séparatiste Yvan Colonna.
Colonna, condamné à perpétuité pour le meurtre en 1998 du préfet de région, Claude Erignac, a été poignardé à mort par un autre détenu.
En octobre, une série d’explosions a secoué l’île, visant principalement des résidences secondaires et des chantiers de construction, mais sans causer de dégâts ni de victimes majeurs.
Le Front de libération nationale de la Corse (FLNC), un groupe séparatiste réclamant l’indépendance de la France plutôt qu’une forme d’autonomie, a revendiqué la responsabilité.
Le FLNC a vu le jour pour la première fois en 1976, mais a depuis été en proie à des luttes internes et s’est divisé à plusieurs reprises en différentes factions.
Il a annoncé en 2014 qu’il déposerait les armes.
Mais cela n’a pas empêché des violences sporadiques sur l’île, qui est une destination touristique très prisée des Français.
Le corse, qui est proche de l’italien standard et compte environ 150 000 locuteurs natifs, est considéré par l’organisation culturelle de l’ONU, l’UNESCO, comme étant en danger de disparition.
(AFP)