Les forces françaises lancent une « opération majeure » pour ouvrir la route vers la capitale agitée de la Nouvelle-Calédonie

Les forces françaises ont lancé dimanche une « opération majeure » pour reprendre le contrôle d’une route reliant Nouméa, la capitale de la Nouvelle-Calédonie, au principal aéroport international, après une sixième nuit de violents troubles.

Les autorités ont indiqué que plus de 600 gendarmes lourdement armés avaient été dépêchés pour sécuriser la Route Territoriale 1, la principale artère reliant la capitale agitée aux liaisons aériennes avec le monde extérieur.

Par ailleurs, les projets de passage du relais de la flamme olympique sur le territoire français ont été annulés samedi.

L’arrivée de la flamme était prévue le 11 juin mais la ministre française des Sports, Amélie Oudéa-Castera, a déclaré que « la priorité doit être donnée au retour au calme » sur le territoire.

« Je pense que tout le monde comprend, compte tenu du contexte, que la priorité est vraiment de consolider le retour à l’ordre public, puis l’apaisement.

« Priorité à la sécurité des habitants, priorité au retour au calme, et priorité à l’amélioration politique de la situation. »

Six personnes ont été tuées et des centaines blessées depuis le début des émeutes lundi, selon les autorités locales.

La violence a été alimentée par le malaise économique, les tensions ethniques et l’opposition de longue date à la domination française sur l’archipel du Pacifique.

Ce qu'il faut savoir sur la Nouvelle-Calédonie

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Le couvre-feu nocturne, l’état d’urgence, l’interdiction de TikTok et l’arrivée de centaines de soldats de France métropolitaine n’ont pas réussi à empêcher de nouveaux troubles dans la nuit de samedi à dimanche.

Des groupes non identifiés ont déclenché deux incendies et attaqué une station-service, selon le bureau du haut-commissaire de Nouvelle-Calédonie.

Mais les autorités ont insisté sur le fait que la situation s’améliorait.

« La nuit a été plus calme », ​​a indiqué le commissariat.

Les médias locaux ont rapporté qu’une bibliothèque publique figurait parmi les bâtiments incendiés.

La mairie a indiqué à l’AFP qu’il n’y avait « aucun moyen de confirmer pour l’instant », car « le quartier reste inaccessible ».

Touristes piégés

Depuis près d’une semaine, les manifestants ont incendié des véhicules, des magasins, des sites industriels et des bâtiments publics, tandis que les forces indépendantistes ont bloqué l’accès à l’aéroport international de la Tontouta.

Un groupe d’entreprises local a estimé les dégâts, concentrés autour de Nouméa, à plus de 200 millions d’euros (200 millions de dollars).

Des journalistes de l’AFP ont tenté dimanche de rejoindre l’aéroport mais ont été stoppés par des groupes bloquant l’accès à plusieurs endroits.

Les vols à destination et en provenance de l’île principale de Nouvelle-Calédonie ont été annulés depuis le début des troubles, bloquant environ 3 200 voyageurs et coupant la route commerciale.

Le ministre français de l’Intérieur, Grald Darmanin, a déclaré qu' »une opération majeure de plus de 600 gendarmes » était en cours de lancement « visant à reprendre totalement le contrôle de la route principale de 60 kilomètres » et à permettre la réouverture de l’aéroport.

La route territoriale 1 à voie unique relie l’aéroport et serpente à travers des collines et des montagnes denses et couvertes de brousse qui ont rappelé l’Écosse à l’explorateur britannique James Cook et ont donné aux îles leur nom actuel.

L’Australie et la Nouvelle-Zélande font partie des pays qui attendent le feu vert de Paris pour envoyer des avions pour évacuer les touristes coincés.

A Wellington, le ministre des Affaires étrangères Winston Peters a déclaré dimanche que les forces de défense néo-zélandaises avaient « terminé les préparatifs » des vols destinés à « ramener les Néo-Zélandais en Nouvelle-Calédonie pendant que les services commerciaux ne fonctionnent pas ».

Le touriste australien Maxwell Winchester et son épouse Tiffany devaient quitter Nouméa mardi.

Au lieu de cela, a-t-il expliqué à l’AFP, ils ont été barricadés dans un complexe hôtelier à mi-chemin entre la ville et l’aéroport, où les stocks diminuent.

« Ils ont incendié toutes les sorties d’autoroute et toutes les routes que l’on pouvait emprunter pour se rendre n’importe où. Ainsi, où que vous soyez, vous êtes bloqué », a-t-il déclaré.

« Nous sommes sur le point de manquer de nourriture », a-t-il déclaré, ajoutant qu’avec les supermarchés inaccessibles ou incendiés, « le personnel de la station utilise essentiellement le marché noir pour obtenir quelque chose ».

« Chaque nuit, nous devions dormir avec un œil ouvert, à chaque bruit, nous avions peur qu’ils viennent nous piller », a-t-il déclaré.

« Ce matin, à une sortie près d’ici, on passe par la gendarmerie et il y a eu une fusillade. »

« Spirale de violence »

La Nouvelle-Calédonie est un territoire français depuis le milieu du XIXe siècle.

Dix dates clés

1853

Le contre-amiral français Auguste Febvrier-Despointes signe l’acte de possession de la Nouvelle-Calédonie au nom de Napoléon III. L’objectif affiché est d’assurer à la France une position dans le Pacifique requise par les intérêts de la marine militaire et commerciale, et d’y établir une colonie pénitentiaire à partir des années 1860.

1878

Les troupes françaises organisent une réponse meurtrière à une révolte majeure des Kanak contre la dépossession de leurs terres. Au total, 200 Européens et au moins 600 insurgés furent tués, certaines tribus furent rayées de la carte et 1 500 Kanaks furent contraints à l’exil.

1946

L’archipel devient un territoire d’outre-mer de la France. Le peuple kanak obtient la citoyenneté française et le droit de vote, qui lui sera accordé progressivement.

1984

Le Front Kanak Socialiste de Libération Nationale (FLNKS) est fondé. Le parti indépendantiste décide de créer un gouvernement provisoire pour un futur Enfants (Nouvelle-Calédonie en langues kanak).

1987

Un référendum sur l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie voit une victoire écrasante (98 %) pour le reste de la France. Le taux de participation électorale était de 59 %.

1988

Le Premier ministre français Jacques Chirac promet d’accorder l’autonomie à la Nouvelle-Calédonie et de la diviser en quatre régions.

22 avril au 5 mai : Deux jours seulement avant le vote du conseil territorial, des militants du FLNKS s’emparent du commissariat de l’île d’Ouva, tuant quatre gendarmes et prenant en otage 26 autres gendarmes non armés. Le bras de fer se termine par un assaut de l’armée française au cours duquel 19 séparatistes kanak et deux soldats sont tués.

26 juin : La Nouvelle-Calédonie signe les accords de Matignon, entamant un processus progressif d’autodétermination et de décolonisation.

1989

Le chef du FLNKS, Jean-Marie Tjibaou, est abattu par Djubelly Wa, un Kanak qui accuse Tjibaou d’avoir signé les accords de Matignon. Wa est abattu par l’un des gardes du corps de Tjibaou.

1998

Le 5 mai, l’Accord de Nouma, signé par le Premier ministre français Lionel Jospin et les dirigeants du mouvement pro-syndical Rassemblement pour la Caldonie dans la Rpublique(RPCR) et le FLNKS, fixe un processus de décolonisation sur 20 ans. Il est ratifié par 71,86 % des Néo-Calédoniens.

2018 à 2023

Le vote anti-indépendance remporte les référendums en 2018 (56,7%), 2020 (53,3%) et 2021 (96,5%). Les partis indépendantistes contestent la validité du scrutin de 2021, marqué par une faible participation électorale en raison de la pandémie de Covid-19.

Macron exhorte les partis indépendantistes et anti-indépendantistes à parvenir à un accord sur le statut de l’archipel d’ici fin 2023, en vue d’une modification de la Constitution française en 2024.

2024

Le 2 avril, le Sénat français approuve une modification constitutionnelle élargissant le corps électoral calédonien afin d’accorder à tous les autochtones et résidents depuis au moins 10 ans le droit de voter aux élections provinciales.

Près de deux siècles plus tard, sa politique reste dominée par le débat sur la question de savoir si les îles devraient faire partie de la France, autonomes ou indépendantes, avec des opinions divisées selon des critères ethniques.

Le dernier cycle de violence a été déclenché par le projet à Paris d’imposer de nouvelles règles de vote qui pourraient donner le droit de vote à des dizaines de milliers de résidents non autochtones.

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Les groupes indépendantistes affirment que cela diluerait le vote des Kanaks autochtones, qui représentent environ 40 pour cent de la population.

Les autorités françaises ont accusé un groupe séparatiste connu sous le nom de CCAT d’être à l’origine des violences et ont placé au moins 10 de ses militants en résidence surveillée.

Le CCAT a appelé vendredi à « un temps d’accalmie pour briser la spirale de la violence ».

Annie, une habitante de Nouméa de 81 ans, a déclaré que les violences de cette semaine avaient été pires que les tumultueuses années 1980, une période d’assassinats politiques et de prises d’otages appelée « Les événements ».

« A l’époque, il n’y avait pas autant d’armes », dit-elle.

Environ 1 000 membres des forces de sécurité ont commencé jeudi à renforcer les 1 700 agents déjà sur le terrain.

Les efforts de négociation de paix ont jusqu’à présent échoué, bien que le président français Emmanuel Macron ait commencé vendredi à contacter individuellement des responsables indépendantistes et anti-indépendantistes, a indiqué son bureau.

(FRANCE 24 avec AFP)

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