Le chef des conservateurs français soutient un accord électoral avec l’extrême droite, un changement historique
Le chef des Républicains conservateurs français a appelé mardi à une alliance entre les candidats de son parti et le Rassemblement national d’extrême droite lors d’élections législatives anticipées, un changement politique qui aura de vastes répercussions.
On dit les mêmes choses, alors arrêtons d’inventer des oppositions imaginaires, a déclaré Eric Ciotti à la télévision TF1. C’est ce que souhaite la grande majorité de nos électeurs. Ils nous disent de parvenir à un accord.
Marine Le Pens, anti-immigration et eurosceptique, le Rassemblement national (RN) devrait largement émerger comme la force la plus puissante après que le président Emmanuel Macron a convoqué de manière inattendue des élections anticipées pour le 30 juin et le 7 juillet, même s’il pourrait ne pas obtenir la majorité absolue.
Le RN cherchait donc des alliés pour assurer le contrôle du Parlement et il a immédiatement applaudi le commentaire de Ciotti. Mais cela signifie que Les Républicains (LR) risquent d’imploser.
Les commentaires de Ciotti signifiaient également qu’un consensus vieux de plusieurs décennies au sein de l’establishment politique français pour unir ses forces pour maintenir l’extrême droite du pouvoir était en train d’exploser.
Les Républicains, et leurs versions précédentes, tous héritiers des partis de Charles de Gaulle et de Jacques Chirac, ont été au pouvoir pendant une grande partie de l’histoire politique moderne de la France.
Mais LR n’est plus que l’ombre d’elle-même, avec beaucoup moins de législateurs, et a déjà perdu des membres clés au profit du parti centriste de Macron et de l’extrême droite.
D’autres partis traditionnels de gauche et de droite ont également été plus faibles depuis que Macron a été élu président pour la première fois en 2017 sur un programme ni de gauche ni de droite avec un parti parvenu qui voulait remodeler le paysage politique français.
Philippe Gosselin, un député LR, a déclaré à Reuters qu’il quitterait LR suite aux commentaires de Ciotti et que les députés LR créeraient un nouveau groupe.
Il est impensable pour moi (et pour beaucoup de députés LR) qu’il puisse y avoir le moindre accord, la moindre alliance, même locale, ou personnelle, avec le RN, a déclaré Gosselin.
D’autres vétérans de LR se sont alignés pour rejeter tout accord avec l’extrême droite. Une source parlementaire LR estime que seulement un sixième des députés LR environ accepteraient un tel accord.
Olivier Marleix, qui dirige le groupe LR de la chambre basse du parlement, a déclaré sur X : Ce que dit Eric Ciotti n’est valable que pour lui, il doit quitter la direction des Républicains.
Le camp de Macron n’a pas tardé à qualifier les propos de Ciotti de honteux et, selon le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, ancien membre de LR, de rappeler les accords de Munich de 1938 signés par la France et la Grande-Bretagne avec l’Allemagne nazie.
Tous les partis politiques français se sont précipités pour trouver des alliances et ont essayé de ne pas s’effondrer depuis que Macron a annoncé des élections anticipées suite à une mauvaise performance de son parti Renaissance aux élections au Parlement européen dimanche.
Les partis de gauche divisés en France se sont engagés à travailler ensemble et à désigner des candidats communs aux élections, mais n’ont pas encore conclu d’accord formel.
L’euro a chuté, tout comme les actions et obligations françaises après l’annonce de Macron.
L’agence de notation Moody a mis en garde contre le risque que l’instabilité politique déclenchée par les élections anticipées signifie pour la France une situation budgétaire déjà difficile.
Le RN réclame en France d’abord des politiques économiques protectionnistes et une réduction radicale de l’immigration. Il limiterait les allocations de garde d’enfants aux citoyens français et retirerait le droit de séjour aux migrants sans emploi depuis plus d’un an.
Il a également proposé une augmentation des dépenses publiques, malgré des niveaux d’endettement français déjà importants, menaçant d’augmenter encore les coûts de financement des banques.
S’adressant au Figaro, Macron a déclaré qu’il était prêt à gagner et que convoquer des élections anticipées était la bonne décision, dans l’intérêt du pays et que cela clarifierait les choses.
Il a exclu toute démission, quel que soit le résultat des élections.
Le parti de Marine Le Pens remporterait 235 à 265 sièges à l’Assemblée nationale, un bond considérable par rapport aux 88 sièges actuels, mais loin des 289 nécessaires pour obtenir la majorité absolue, selon l’enquête de Toluna Harris Interactive pour Challenges, M6 et RTL publiée lundi.
Le même sondage donne LR entre 40 et 55 sièges, donc les deux ensemble pourraient obtenir la majorité absolue, mais sans certitude.