La Nuit des églises de France, une opportunité de comprendre la culture chrétienne à travers l’art – OSV News
Par Caroline de Sury
PARIS (OSV News) — « La nuit des églises » est devenue ces dernières années un événement incontournable pour de nombreux catholiques français et ceux qui souhaitent découvrir la beauté du patrimoine chrétien du pays.
Du 22 juin au 7 juillet, de nombreuses églises de France ouvriront leurs portes le soir, à la tombée de la nuit, pour les manifestations artistiques et culturelles de « La nuit des églises », organisées par les évêques français depuis 2011.
En France, en vertu de la loi de séparation des Églises et de l’État, les édifices religieux sont la propriété des communes depuis 1905, tandis que l’État est propriétaire des cathédrales. Les lieux de culte sont attribués uniquement aux diocèses et à leur clergé. « La nuit des églises » est donc organisée grâce à la collaboration des paroisses et des mairies, avec l’aide des associations de sauvegarde du patrimoine.
« Il y a environ 42 000 églises paroissiales en France », a déclaré le père Gautier Mornas à OSV Actualités. «Ils constituent un patrimoine national qui nous est cher à tous.»
Le Père Mornas est coordinateur et promoteur de l’événement, en tant que chef du département d’art sacré de la conférence des évêques de France. « Plus de 7 000 soirées religieuses ont déjà été organisées au cours des 13 dernières années », a-t-il déclaré. « De plus en plus d’églises participent à l’événement, dont, cette année, quatre des cinq églises françaises de Rome, pour la première fois ! C’est une manière de découvrir ou redécouvrir, à travers l’art, ce qu’est une église et le sens de ce qui y est vécu.
« Les églises participantes seront ouvertes pendant la nuit, au propre comme au figuré », a expliqué le Père Mornas. « Jusqu’à tard dans la nuit, les églises accueilleront des personnes qui ne viennent pas habituellement ici, pour des programmes culturels et artistiques, dans le respect de la spécificité des lieux. »
« Les propositions sont très variées », a expliqué le père Mornas, qui a évoqué des concerts aux flambeaux, des expositions de photos, des carillons, des conférences, des représentations théâtrales et des jeux de lumière sur les vitraux. Dans une église du sud de la France, a-t-il précisé, un comédien professionnel lira des extraits célèbres de la littérature française, depuis la chaire de pierre vieille de plusieurs siècles d’une petite église de village.
Cette année, « La nuit des églises » est parrainée par l’Académie des Beaux-Arts. Pour lancer l’événement, plusieurs universitaires ont accueilli le 29 mai 2019 à Paris 200 jeunes des banlieues et communes rurales, invités par la conférence des évêques, pour une journée de découverte des églises parisiennes.
« Cette rencontre à l’Académie des Beaux-Arts a été un moment très fort, explique le père Mornas. Les jeunes ont pris conscience que le patrimoine n’est pas seulement un héritage du passé, mais aussi quelque chose que nous construisons aujourd’hui et dont ils peuvent eux aussi être partie prenante, là où ils se trouvent. »
Parmi les invités spéciaux du monde universitaire figurait Thierry Escaich, organiste et concertiste et compositeur international. Il a été nommé organiste de la cathédrale Notre-Dame de Paris en avril par le recteur de la cathédrale. Il sera l’un des quatre organistes titulaires qui, à partir du 15 décembre, donneront un concert tous les dimanches après-midi à Notre-Dame, sur l’orgue de près de 40 pieds de haut qui, depuis l’incendie, a été entièrement démonté, nettoyé et remonté.
Le lien entre culte et culture est la spécialité du Père Mornas. Il est membre de la commission mandatée par le ministère de la Culture qui examine actuellement les candidatures d’une centaine de binômes d’artistes et maîtres verriers candidats à la réalisation des nouveaux vitraux contemporains de la cathédrale Notre-Dame. Les fenêtres seront basées sur le thème biblique de « l’arbre de Jessé » et sur la prophétie d’Isaïe selon laquelle le Messie serait une « progéniture de Jessé ».
Le comité sélectionnera une liste d’artistes et la transmettra à l’archevêque de Paris pour discussion avec le président Emmanuel Macron. « Des célébrités du marché du vitrail contemporain n’ont pas hésité à participer au concours, aux côtés d’artistes moins connus », précise le père Mornas.
La question des vitraux de Notre-Dame est également délicate, car de nombreuses personnalités culturelles et religieuses s’opposent à l’idée même de créer des vitraux contemporains pour la cathédrale. Ils préféreraient conserver les « grisailles », ces vitraux clairs et sans motifs créés au XIXe siècle, que la nouvelle version discutée vise à remplacer d’ici 2026. Les anciens ont été conçus par l’architecte Eugne Viollet-le-Duc, qui a restauré Notre-Dame à l’époque.
Même si Notre-Dame, dont la réouverture est prévue le 8 décembre, n’est pas incluse dans la nuit des églises de cette année, c’est l’église dont on parle le plus en France ces jours-ci.
En juin, une « discussion franche », a déclaré le père Mornas, a eu lieu à Paris au sujet des clés de la cathédrale, que Macron envisageait de remettre solennellement à Mgr Laurent Ulrich, archevêque de Paris, lors de la réouverture officielle de Notre-Dame.
« L’archevêque a rappelé que si l’État est propriétaire de la cathédrale et pilote les travaux, l’attribution de la cathédrale au diocèse de Paris n’a jamais été remise en cause ni interrompue », a déclaré le père Mornas. « Il a donc déclaré qu’il n’y avait aucune raison pour qu’il reçoive les clés de la cathédrale des mains du président. »
Finalement, l’affaire a été résolue fraternellement, a ajouté le père Mornas. « Il n’y aura pas de remise de clés, pas de discours d’Emmanuel Macron non plus à l’intérieur de Notre-Dame, car il ne doit pas y avoir de discours politiques dans la cathédrale. Si (le président) doit prendre la parole ce jour-là, ce sera sur le parvis », a-t-il précisé.
« C’est emblématique du dialogue entre l’Eglise et l’Etat en France aujourd’hui ! ‘La nuit des églises’ le montre : les organisateurs sont à moitié des organismes ecclésiastiques, à moitié des acteurs publics et ça marche ! », a déclaré le père Mornas à OSV News.
Caroline de Sury écrit pour OSV News depuis Paris.