La France prévoit une piqûre de CV pour réduire les préjugés au travail

Le gouvernement français enverra aux entreprises des CV avec des noms à consonance ethnique lors de tests secrets pour vérifier qu’ils ne font pas de discrimination raciale à l’égard des candidats à un emploi.

Les tests font partie d’un ensemble de 80 mesures présentées par Elisabeth Borne, la première ministre, dans un ambitieux plan quadriennal de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations liées à l’origine dans toutes les couches de la société.

Mme Borne n’a pas précisé comment le gouvernement effectuerait les tests, qui seront livrés aux organisations des secteurs public et privé.

Des sources gouvernementales ont indiqué qu’une partie des tests consisterait à envoyer deux CV identiques pour la même offre d’emploi, la seule différence étant l’origine du candidat.

Le gouvernement adoptera une réponse graduée à toute entreprise coupable de discrimination, avec la menace de naming and shaming ou une nouvelle amende civile dissuasive.

Alors que la France est officiellement daltonienne puisque les statistiques sur l’ethnicité, l’origine et la religion sont interdites, elle a été régulièrement accusée de ne pas s’attaquer aux discriminations profondément enracinées, en particulier sur le marché du travail et dans la police.

Lors du lancement du plan lundi, Kaltoum Gachi, co-présidente de l’organisation antiraciste MRAP, a raconté comment son frère, Kamel, avait échoué dans sa longue recherche d’emploi chez un constructeur automobile jusqu’à ce qu’il change son nom en Kévin.

La France a déjà testé l’idée de CV anonymes sans informations personnelles comme les noms, adresses et âges, pour voir si cela réduisait la discrimination à l’emploi.

Cependant, une étude de 2017 pour l’agence française pour l’emploi a suggéré que cette décision était contre-productive car les employeurs ne font en fait pas de discrimination sur les origines sociales ou nationales et ont tendance à promouvoir la discrimination positive, ce qui n’est pas possible si les CV sont anonymes.

L’histoire alerte le présent

Une autre mesure marquante du plan de lutte contre les discriminations est de veiller à ce que chaque écolier participe à au moins un voyage vers un lieu de mémoire de l’Holocauste ou autre illustrant les horreurs que le racisme peut produire.

L’histoire alerte le présent, a déclaré Mme Borne, dont le père juif a survécu à un camp de concentration nazi pour se suicider à l’âge de 11 ans.

Le plan comprend la formation des enseignants et des fonctionnaires sur la discrimination et le renforcement de la capacité de punir les personnes dénoncées pour discrimination.

Il renforcera également les pouvoirs d’émettre des mandats d’arrêt à l’encontre de ceux qui utilisent la liberté d’expression à des fins racistes ou antisémites. Les lanceurs d’alerte qui dénoncent la discrimination seront mieux protégés.

Mme Borne a déclaré que son plan offrira également aux victimes de racisme et de discrimination la possibilité de porter plainte devant un poste de police, et de manière partiellement anonyme.

Il augmentera également les peines contre les policiers ou toute personne chargée d’une mission publique s’ils sont reconnus coupables de discrimination.

La police française a fait l’objet de vives critiques ces dernières années pour ne pas avoir éradiqué la brutalité et le racisme dans ses rangs.

Le nouveau plan s’engage également à lutter contre la discrimination à l’égard des Roms.

La haine s’est réinventée

Il n’y aura pas d’impunité pour la haine, a déclaré Mme Borne, dans un discours à l’Institut du monde arabe.

Elle a ajouté que la tolérance est en hausse, mais que la haine s’est réinventée.

Notre premier défi est de regarder de front la réalité du racisme et de l’antisémitisme et de ne rien céder à ceux qui falsifient l’histoire, qui réécrivent notre passé, en oubliant ou en déformant certaines pages, a-t-elle dit.

Malgré les plans gouvernementaux successifs, le nombre estimé de victimes qui subissent au moins une agression raciste, antisémite ou xénophobe en France reste de 1,2 million par an, selon la Commission nationale consultative des droits de l’homme.

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