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Gwendal Poullennec : le bonhomme Michelin qui a le pouvoir de faire ou défaire les restaurants

Paris (AFP) Directeur du Guide Michelin depuis cinq ans, Gwendal Poullennec a le pouvoir de faire trembler dans sa toque les chefs de cuisine les plus aguerris.

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La devise de Poullennec, selon les membres de l’équipe, est « En mouvement », qu’il s’applique autant à lui-même qu’au célèbre guide rouge qu’il a contribué à diffuser dans le monde entier.

L’homme de 44 ans marche vite et aime brûler toutes les calories sur son vélo : il a 14 000 km au compteur.

Un chef amer a également fait remarquer qu’il pouvait passer aussi peu que 30 secondes au téléphone avec ceux qui perdent l’une des étoiles les plus convoitées du Guide Michelin.

Le pouvoir de Poullennec se mesure au grand nombre de « non-commentaires » que son nom suscite lorsque l’AFP sollicite des commentaires des acteurs du secteur.

Mais c’est le pouvoir du Guide Michelin plutôt que celui de l’homme lui-même, insiste-t-il.

« Je ne suis que de passage, je suis là pour assurer la continuité », a-t-il expliqué à l’AFP.

Ayant grandi entre l’ouest de la France et la banlieue parisienne, la famille Poullennec ne fréquentait pas beaucoup de restaurants.

Mais après des études de commerce, il rejoint le groupe Michelin, dans l’espoir de faire partie de son guide gastronomique.

Poullennec a contribué à la diffusion des éditions internationales du guide sur 45 destinations
Poullennec a contribué à la diffusion des éditions internationales du guide sur 45 destinations ALAIN JOCARD / AFP

Après un passage dans une usine de pneus, son souhait s’est réalisé.

La qualité essentielle, dit-il, est d’avoir « un bon appétit » et, comme l’a constaté l’AFP lors d’un déjeuner à Paris, de prendre plaisir à finir les plats des autres par curiosité.

Il se souvient de son premier repas – gargantuesque – après avoir rejoint l’équipe du guide. C’est en Bourgogne, haut lieu de la gastronomie française, qu’on lui a servi une « cocotte entière de tripes » et un « saladier de mousse au chocolat ».

« Simple et compréhensible »

La rupture de Poullennec est survenue lorsqu’il a été envoyé au Japon en 2006 pour lancer l’édition Michelin de Tokyo – une tâche pas simple dans un pays si protecteur de ses traditions culinaires codifiées.

En plus de pouvoir manger des « sushis à la tonne », il a vu l’édition devenir un grand succès.

« Nous avons vendu un demi-million d’exemplaires, plus qu’Harry Potter ! » il a dit.

En 2018, il avait gravi les échelons pour devenir directeur du guide suite au départ à la retraite de l’Américain Michael Ellis.

Poullennec a supervisé une nouvelle ère, comprenant un passage inévitable à une stratégie en ligne, l’acquisition du jeune concurrent Le Fooding et la diffusion du guide vers de nouvelles destinations à travers le monde.

Avant son voyage au Japon, ils n’étaient que 10, tous en Europe. Il existe aujourd’hui 45 éditions sur plusieurs continents.

Elle se développe également dans l’hôtellerie. L’une des premières démarches de Poullennec a été de racheter le site de réservation Tablet, et Michelin lancera dans les prochaines semaines ses premiers avis sur les hôtels (les meilleures clés pour recevoir des clés au lieu d’étoiles).

Père de cinq filles, Poullennec aime cuisiner les repas de famille et faire son propre pain. Dans les restaurants, il recherche « une cuisine simple et compréhensible » mais « avec maîtrise ».

Il refuse de nommer son plat préféré de peur qu’on le lui serve ad nauseam, et il garde généralement le silence sur son opinion sur certains plats.

Inévitablement, ce travail lui a valu des ennemis.

Le chef étoilé Marc Veyrat avait tenté de poursuivre le guide en justice en 2019 après une véhémente dispute autour d’une supposée touche de cheddar dans son soufflé (le cheddar étant considéré comme un ingrédient bien trop bon marché pour un chef français respectable) et la perte de sa troisième étoile.

Le chef Marc Veyrat a tenté de poursuivre le guide après avoir perdu une étoile
Le chef Marc Veyrat a tenté de poursuivre le guide après avoir perdu une étoile JACQUES DEMARTHON/AFP/Fichier

Il y a eu également un tollé lorsque le Michelin a déclassé certains restaurants en 2021, au plus fort de la crise cauchemardesque du Covid-19 dans l’industrie.

Pour rester respecté par les lecteurs, de tels incidents sont « difficiles mais nécessaires », a déclaré Poullennec.

Il connaît personnellement de nombreux grands chefs français, échangeant parfois des recettes avec eux, mais insiste sur le fait qu’il garde ses distances avec eux lorsqu’il s’agit du guide.

Une recommandation de Michelin « se base sur le talent, pas sur la réputation, et encore moins sur leur influence », a-t-il conclu.

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