Entre deux mondes: Les brutalement exploités en France
Entre deux mondesest un film réalisé et co-écrit par l’auteur français Emmanuel Carrre. Il est vaguement basé sur un ouvrage autobiographique de la journaliste d’origine belge Florence Aubenas, qui a passé des mois à travailler sous couverture comme femme de ménage pour enquêter sur les conditions auxquelles sont confrontés les travailleurs les moins bien payés.
Son titre français de livres de 2010,Le Quai de Ouistreham(quai ou quai de Ouistreham), fait référence au service de ferry entre le port de Ouistreham, dans le nord-ouest de la France, et Portsmouth en Angleterre, pour lequel elle a travaillé dans le cadre de ses recherches. Mais Aubenas voulait aussi clairement que le titre rappelle le célèbre ouvrage de l’écrivain britannique George Orwell de 1937,La route vers WiganJetée(en français,Le Quai de Wigan), qui raconte son expérience parmi les travailleurs des West Midlands dévastés par la Grande Dépression.

Dans l’adaptation cinématographique romancée du livre d’Aubenas (qui a remporté plusieurs prix), la célèbre auteure Marianne Winckler (Juliette Binoche) abandonne sa vie et ses relations à Paris pour travailler comme femme de ménage (le titre anglais de l’ouvrage d’Aubenas estLe nettoyeur de nuit) à Caen dans le nord de la France. En réalité, le premier personnage que l’on voit défiler avec détermination dans le paysage industriel est Christle (Hlne Lambert). Lorsqu’elle arrive au bureau de chômage du gouvernement, elle réprimande avec colère un fonctionnaire pour les formalités bureaucratiques qui pourraient lui faire perdre ses allocations. Elle a trois enfants à nourrir et n’a aucun revenu.
Marianne, après avoir appris les exigences humiliantes du processus d’entretien d’embauche (je suis énergique, j’ai l’esprit d’équipe, etc.), trouve un emploi dans une entreprise de nettoyage. Elle subit une autre humiliation, un cours de ménage avec un formateur. Christle apparaît ici, tout comme Marilou (La Carne), les deux femmes dont Marianne va finalement devenir particulièrement proche.
Licenciée pour avoir répondu à un patron intimidateur, Marianne retourne au bureau de chômage, où elle est reconnue pour qui et ce qu’elle est par son conseiller, qui promet de garder le secret. Pendant ce temps, Marianne confie à Marilou qu’elle n’avait jamais réalisé auparavant qu’il n’y avait plus de vrais emplois, c’est-à-dire avec des horaires décents, des avantages sociaux et des possibilités d’avancement.
Finalement, le journaliste-écrivain d’investigation trouve du travail sur le ferry, où il nettoie les chambres, alors qu’il est à quai à Ouistreham. La femme qui l’embauche, une collègue, lui dit que c’est un véritable enfer, une opération commando, et tout cela au salaire minimum. L’équipe de nettoyage dispose de 320 pièces à nettoyer sur le ferry, en seulement quatre minutes pour chaque pièce. Marianne se retrouve paralysée d’épuisement après les premières nuits de travail.
Elle commence à développer une amitié avec Christle, une dure à la peau épaisse, proposant à l’autre femme, qui n’a pas de voiture, de la conduire au travail chaque matin. Dans une séquence touchante, Marianne aperçoit Christle en train de fouiller dans son sac et son portefeuille. Mais rien ne manque. Le jour approprié, Christle et ses trois adorables jeunes fils célèbrent l’anniversaire de Marianne. Christle regardait sa carte d’identité pour connaître sa date de naissance ! Les jeunes garçons offrent à Marianne un collier qu’elle s’engage à porter pour le reste de sa vie.
Marianne rencontre aussi, ou est rencontrée par, Cdric (Didier Pupin), lui aussi au chômage et plutôt homme à femmes. À un moment donné, il lui répare un pneu crevé. Ils passent un peu de temps ensemble, mais rien de grave.
Attention, lecteur, méfiez-vous ! Quand Marilou laisse son manteau derrière elle dans une cabine et que le trio se dépêche de revenir le récupérer, pour ensuite voir le ferry partir pour l’Angleterre avec eux à bord. Ils se cachent dans une chambre de première classe et sirotent du champagne. Mais un vieil ami reconnaît Marianne et son secret éclate.
Entre deux mondesa une certaine authenticité, dans sa mesure. Binoche va bien et les autres acteurs prennent leurs personnages ouvriers au sérieux.
L’existence d’emplois précaires, précaires, mal payés, facilement éliminés, est un phénomène mondial, sérieusement aggravé par la pandémie. La France compte l’un des pourcentages de travailleurs précaires les plus élevés d’Europe, avec des millions de personnes entrant dans cette catégorie.
Les sombres perspectives pour Christle, Marilou, Cdric et les autres font partie de la réalité sociale contemporaine, tout comme l’abandon complet de ces travailleurs par le soi-disant mouvement ouvrier, les syndicats et les partis officiels de gauche.
Entre deux mondesprend également le temps d’examiner brièvement la situation de ceux qui sont encore plus mal lotis, les immigrés sans papiers du Soudan par exemple, harcelés par la police à 5 heures du matin, qui leur enlèvent leurs couvertures par temps glacial.
La fin du film présente des problèmes. Encore une fois, lecteur, méfiez-vous. Une fois l’imposture de Marianne apparue, Christle et, dans une certaine mesure, Marilou, la trouvent impardonnable. Christle traite Marianne de fausse personne, moins que moi. Marianne a humilié tout le monde, faisant semblant d’être ce que vous n’étiez pas. Perdez-vous. Après la sortie du livre-expos, Christle convoque une dernière fois Marianne sur les quais et la met au défi de nettoyer les chambres pendant seulement une heure et demie, après quoi elle sera rendue à ses amis. Marianne trouve cela inutile. Alors, Christle dit : Chacun à sa place, et s’en va sans un autre mot.
Il y a quelque chose de déplacé ou de faux ici. Il est compréhensible qu’un ami soit d’abord irrité par la tromperie, mais la révélation des conditions sociales n’est-elle pas la question centrale ? Quelles que soient les limites et quelle que soit la combinaison imparfaite de motivations, Marianne a mis en lumière la dure exploitation et les situations de vie brutales de ces travailleurs. Ce genre de moralisation empêcherait les artistes, et les intellectuels en général, de discuter ou de rendre public la situation de la classe ouvrière. Le film Carrres consacre ses dernières énergies à une problématique secondaire ou tertiaire. Qu’en est-il des réalités de la vie moderne ?

Dans l’ensemble, même siEntre deux mondesest assez sincère, il a un caractère plutôt tiède et peu aventureux. Le sujet est intéressant, mais le film n’est guère novateur. (Le moment le plus émouvant est la fête d’anniversaire surprise et impromptue.) Carrre n’envisage pas encore la possibilité que ces travailleurs puissent se révolter contre leurs conditions, même si les travailleurs français démontrent presque continuellement leur intense combativité.
Carrre est célébré dans certains milieux comme un écrivain français majeur. Ce critique ne peut pas porter de jugement, mais il n’est pour le moins pas encourageant ! de tomber sur l’hommage journalistique de Carrres, paru dans LeGardienen 2017, au nouveau président français de l’époque, Emmanuel Macron, désormais mieux connu (et largement détesté) comme le président des riches.
C’est le genre de passage sur lequel Carrre a perdu son temps dans cet article : Chaque interaction avec Macron suit le même protocole. Il tourne vers vous ses yeux bleus pénétrants et ne détourne pas le regard. Quant à votre main, il la serre en deux temps : d’abord avec une prise normale, puis, comme pour montrer qu’il ne s’agit pas d’une poignée de main ordinaire et routinière, il augmente la pression tout en intensifiant son regard.
Et les commentateurs professionnels qui ont commencé à le laisser tomber après seulement quelques mois de présidence peuvent continuer à le traiter de marquis poudré, de mégalomane aux prétentions royales, de président riche ou de communicateur sans cause, mais lui (Macron) s’en fiche. moins. En revanche, les personnes avec lesquelles il est directement, physiquement en contact, sont son pain et son beurre. Quiconque a eu la main serrée par Macron est perdu pour l’opposition : il est destiné à voter Macron et à se convertir au macronisme.
En savoir plus : C’est un type qui ne brigue qu’un seul poste dans sa vie, celui de président de la république, et qui gagne. Un gars qui comprend que les partis qui ont structuré la vie publique française depuis la fin de la seconde guerre mondiale sont cliniquement morts, et qu’il est temps d’offrir du nouveau aux Français. Même cet aveu n’arrange pas les choses : en même temps, je savais que mon vote était un vote de classe : il était normal que des privilégiés votent pour Macron.
Assez, c’est pathétique et superficiel, de l’impressionnisme journalistique et des vœux pieux. Quelqu’un qui pense et dit de telles choses ne pénétrera jamais dans les questions les plus critiques et les plus brûlantes de notre époque, en art ou en politique.