En France, il y a des objections à ce qu’Aya Nakamura chante aux Jeux olympiques
Un chanteur français populaire aurait été invité à se produire lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de 2024, mais tout le monde en France n’a pas accueilli favorablement cette suggestion.
STEVE INSKEEP, HÔTE :
La France accueille les Jeux olympiques cet été, il est donc naturel que la cérémonie d’ouverture inclue la prestation d’un chanteur français. Et cela laisse une question : pourquoi certains hommes politiques français s’y opposent-ils ? Rapporte Eleanor Beardsley de NPR.
(EXTRAIT SONORE DE LA CHANSON, « DJADJA »)
AYA NAKAMURA : (Chant en français).
ELEANOR BEARDSLEY, BYLINE : Le tube « Djadja » d’Aya Nakamura joue toujours partout en France. Depuis la sortie de la chanson en 2018, elle a été écoutée un milliard de fois. La chanteuse est née au Mali, en Afrique de l’Ouest, mais a grandi en banlieue parisienne. Elle est l’artiste française la plus vendue dans le monde – sa plus grande star depuis Edith Piaf. Olivier Cachin est critique musical.
OLIVIER CACHIN : La musique d’Aya Nakamura est du R&B à saveur afro, avec des rythmes zouk ou afrobeat. Elle chante, vous savez, tout sur la vie, sur les histoires d’amour. Je veux dire, c’est vraiment de la musique pop à son meilleur.
BEARDSLEY : Le président Emmanuel Macron aurait demandé à Nakamura de se produire lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques après lui avoir dit qu’elle était fan d’Edith Piaf. Il n’a pas fallu longtemps pour que l’extrême droite se jette sur l’actualité. La politicienne Marion Maréchal-Le Pen est la petite-fille du fondateur du parti d’extrême droite français et la nièce de son leader actuel. Maréchal elle-même appartient à un mouvement encore plus extrémiste. Elle s’est exprimée dans une interview sur la radio Europe 1.
(EXTRAIT SONORE DE L’ENREGISTREMENT ARCHIVÉ)
MARION MARECHAL-LE PEN : (Par l’intermédiaire de l’interprète) Les Français ne veulent pas être représentés aux yeux du monde par un chanteur dont le style est influencé par le quartier et l’Afrique. Il s’agit d’une démarche politique d’Emmanuel Macron, qui veut dire au monde que le visage de la France est multiculturel et que nous ne sommes plus une nation avec des racines chrétiennes et une culture européenne.
BEARDSLEY : La France possède l’une des sociétés les plus multiculturelles d’Europe, mais pas lorsqu’il s’agit de savoir qui parle au nom du pays, déclare l’écrivain et cinéaste Rokhaya Diallo.
ROKHAYA DIALLO : La polémique porte sur qui sera le visage de la France. Ce n’est pas la première fois que nous voyons des personnes de couleur être nommées ou choisies pour représenter la France ou usurper l’identité de la France et être la cible de réactions racistes.
(EXTRAIT SONORE DE LA CHANSON, « POOKIE »)
NAKAMURA : (Chant dans une langue autre que l’anglais).
BEARDSLEY : Les chansons de Nakamura vibrent de pouvoir et de sexualité féminine. Ses paroles épicées d’argot sont un mélange de français, d’arabe, d’anglais et de langues ouest-africaines. Ce n’est pas un cocktail musical qui plaira à tout le monde. Une autre politicienne d’extrême droite a qualifié ses paroles de forme de Grand Remplacement linguistique, faisant référence à la théorie du complot selon laquelle les personnes de couleur sont utilisées pour remplacer les populations blanches. Cachin qualifie de réactionnaire le débat sur les paroles de Nakamura.
CACHIN : Tout le monde sait que la langue est quelque chose qui évolue. Les mots évoluent – les accents, les expressions – tout évolue. Et juste parce qu’ils ne comprennent pas certains de ses slogans, ils disent que ce n’est pas du français. Mais c’est à eux qu’il appartient de prendre une leçon de français, je veux dire du français d’aujourd’hui, pas du français du Moyen Âge.
BEARDSLEY : Nakamura a de nombreux partisans. Le ministre français des Finances, Bruno Le Maire, a déclaré que le choix de la faire chanter aux Jeux olympiques faisait preuve d’audace et de panache. Et Sophie Binet, la première femme à diriger le plus grand syndicat de France, a déclaré à BFMTV que ses chansons dynamisaient leurs marches de protestation.
(EXTRAIT SONORE DE L’ENREGISTREMENT ARCHIVÉ)
SOPHIE BINET : (Par l’intermédiaire de l’interprète) Elle incarne la diversité de la France. Malgré ce que dit l’extrême droite, la France a toujours été plus riche grâce à son immigration. Il n’y aurait pas de Marie Curie sans immigration.
BEARDSLEY : Nakamura n’a pas parlé de la controverse.
(EXTRAIT SONORE DE LA CHANSON, « DOGGY »)
BEARDSLEY : Au lieu de cela, elle a répondu en chanson. Je n’ai pas à faire mes preuves, chante-t-elle. Je n’ai pas d’ennemis. Je fais la couverture des magazines.
Le procureur de Paris prend les choses plus au sérieux et ouvre une enquête sur certains commentaires en ligne pour d’éventuels discours de haine. Comme Edith Piaf, Nakamura a grandi dans un quartier pauvre d’origine immigrée. Ironiquement, dit Cachin, ses détracteurs auraient certainement également détesté Piaf.
CACHIN : Tous ces extrémistes de droite auraient été les mêmes dans les années 50. On aurait dit que Piaf chantait sur les prostituées et l’alcool. Mais la vérité est que, comme Edith Piaf en son temps, Aya Nakamura est la France d’aujourd’hui – de 2024.
BEARDSLEY : Cachin dit que Nakamura canalisant Piaf est un moyen idéal pour représenter la France à la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques.
(SOUNDBITE OF SONG, « HYMNE A L’AMOUR »)
EDITH PIAF : (Chant en français).
BEARDSLEY : Eleanor Beardsley, NPR News, Paris.
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