Emmanuel Macron a-t-il brisé la France ?

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Exprimé par l’intelligence artificielle.

Jean Lichfieldest un ancien rédacteur en chef étranger de l’Indépendant et a été correspondant du journal à Paris pendant 20 ans.

En 2017, Emmanuel Macron promettait une nouvelle politique consensuelle. Il serait, disait-il, un révolutionnaire en costume, démantelant les intérêts particuliers et brisant les barrières qui restreignaient les opportunités et étouffaient la prospérité française.

Pas plus tard qu’en juin dernier, Macron parlait d’un nouveau mode de gouvernance. Les Français étaient, a-t-il dit aux journaux régionaux français, fatigués des réformes qui viennent d’en haut.

Neuf mois plus tard, des émeutes éclatent dans plusieurs villes françaises. Il y a des autoroutes bloquées, des grèves des transports et de l’énergie, et des montagnes de déchets non collectés dans la capitale française alors que Macron a utilisé son pouvoir constitutionnel spécial pour imposer une réforme des retraites détestée par 70 % des adultes français.

Loin d’être un révolutionnaire adapté, Macron est devenu un leader français traditionnel confronté à l’immobilisation du peuple français. Comme Nicolas Sarkozy et François Hollande avant lui, il tente de réformer la France contre son gré.

Et pourtant, il y a quelque chose d’hystérique dans l’humeur politique actuelle en France qui va au-delà des protestations auxquelles sont confrontés les prédécesseurs de Macron.

C’est en partie la faute de Macron. Il a promis une approche consensuelle et ascendante, supprimant les intérêts acquis et la pensée figée des partis politiques et des syndicats.

Il a fini par imposer, presque par édit, une réforme des retraites assez modeste qui est rejetée par la grande majorité des électeurs et déformée (avec succès) par les syndicats et les partis d’opposition qu’il espérait marginaliser.

Macron a laissé presque toute la vente de la réforme des retraites à son Premier ministre, Elisabeth Borne, et au reste de son gouvernement. Ils ont fait un travail brouillon pour vendre la réforme confuse mais sensée d’un système en déficit permanent et qui peinera à survivre si l’âge officiel de la retraite n’est pas relevé progressivement.

Mais s’agit-il d’une réforme brutale et violente, comme le prétendent même les dirigeants syndicaux modérés ? À peine.

L’âge officiel de la retraite en France augmentera progressivement de 62 à 64 ans d’ici 2030. En d’autres termes, les Français prendront toujours leur retraite plus tôt dans sept ans que la plupart des Européens ne le font actuellement.

L’hystérie du débat sur les retraites reflète un paysage politique bouleversé. Depuis que l’ancien système gauche-droite s’est effondré il y a dix ans (ce que Macron lui-même a encouragé et dont il a tiré parti), la politique en France est devenue plus méchante et plus polarisée.

Comme ses prédécesseurs, le président Emmanuel Macron tente de réformer la France contre son gré | Sameer Al-Doumy/AFP via Getty Images

La gauche est plus catégoriquement à gauche. La droite a dérivé vers l’extrême droite. Macron n’a jamais correctement institutionnalisé ou canalisé son nouveau centre.

Il est accusé à gauche comme à droite d’avoir détruit ou brisé la France. Dans les 15 mois suivant sa première victoire électorale en 2017, il a fait face à une rébellion populaire sans précédent contre les taxes sur l’essence et le diesel dans les campagnes et les banlieues françaises par le mouvement des gilets jaunes.

Dans les 11 mois suivant sa réélection en avril de l’année dernière, il fait maintenant face aux plus grandes manifestations syndicales depuis deux décennies, qui menacent de se transformer en insurrection pure et simple.

Mais Macron a-t-il brisé la France ?

Le chômage sous sa direction est passé de 9,4% à 7,2%. Le chômage des jeunes a diminué encore plus dramatiquement. Les modifications de Macron au droit du travail et à la réduction des charges sociales contestées à l’époque peuvent réclamer une partie du crédit.

Les dépenses du service de santé de l’État ont augmenté de manière significative pour la première fois de ce siècle (mais les hôpitaux sont en difficulté et les médecins se plaignent de leur faible rémunération). Les Français ont assez bien résisté à la pandémie de COVID-19 et à la flambée des prix de l’énergie l’année dernière grâce à de vastes programmes de dépenses publiques.

NOTATION D’APPROBATION DU PRESIDENT EMMANUEL MACRON

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L’échec de Macron et de son peuple à communiquer leur cas est souvent un mélange déroutant d’arrogance et de résignation.

Le conflit des retraites en est un bon exemple. La plupart des travailleurs les plus militants des chemins de fer, du métro parisien, des centrales électriques défendent des régimes de retraite spéciaux qui leur permettent de prendre leur retraite dans la cinquantaine.

Ces régimes sont en permanence dans le rouge : 3 milliards par an pour les seuls cheminots. Le déficit est couvert par l’État, c’est-à-dire par les impôts des personnes qui partent à la retraite beaucoup plus tard que les cheminots. La plupart des offres spéciales seront progressivement supprimées dans le cadre de la réforme Macron-Borne.

Le gouvernement a été étrangement réticent à utiliser des arguments financiers de ce genre. En conséquence, la réforme a été décrite avec succès par la gauche et l’extrême droite comme une réforme des banquiers comme si un pays avec une dette publique accumulée de 3 000 milliards de dollars (114 % du PIB) n’a pas à se soucier de ses créanciers.

Et maintenant? Les troubles vont s’apaiser. Le gouvernement Bornes survivra presque certainement à une motion de censure à l’Assemblée nationale lundi. Sa récompense sera presque certainement renvoyée par Macron d’ici un mois.

Le nouveau Premier ministre tentera de prendre un nouveau départ, mais la suite du second mandat de Macron sera assombrie par la confrontation sur les retraites. Il a promis de réduire le chômage à 5,5 % (c’est-à-dire le plein emploi) d’ici la fin de son second mandat, mais ce sera un combat pour son gouvernement centriste minoritaire d’adopter les modifications du droit du travail qu’il souhaite.

La Première ministre Elisabeth Borne devrait survivre à une motion de censure à l’Assemblée nationale française | Photo de la piscine par Gonzalo Fuentes/AFP via Getty Images

Surtout, Macron n’a pas de successeur évident. Plusieurs politiciens centristes aspirent à le suivre mais la marque et l’approche Macron ne seront pas un grand gagnant des votes en 2027.

Il n’a pas réussi à établir un lien direct avec le peuple français, supprimant les partis politiques et les syndicats. Il n’a pas réussi à convaincre les Français qu’ils souffrent des blocages et des intérêts acquis de groupes d’intérêts particuliers.

Macron a, à certains égards, réussi. Le macronisme, tel qu’il a d’abord été défini, a échoué.

Avec la gauche radicalisée et éclatée et le centre-droit paralysé par des querelles internes égoïstes, Marine Le Pen et l’extrême droite attendent patiemment dans les coulisses.

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