Diplomatie moderne : le fossé entre l’Allemagne et la France risque de s’aggraver

La relation entre la France et l’Allemagne est au cœur du projet européen et est essentielle à la stabilité européenne, mais l’alliance s’effondre. La guerre en Ukraine a exacerbé le déplacement du centre d’influence de l’Union européenne vers l’Europe centrale – l’Allemagne et ses voisins orientaux – où, contrairement à l’Allemagne, la position de la France n’a jamais été relativement impressionnante. Les deux pays ont des désaccords sur la crise énergétique qui sévit en Europe et sur leurs politiques de défense. Ce que les désaccords croissants signifieront pour l’UE au milieu de la guerre russo-ukrainienne, alors que l’Europe a besoin de plus de coopération, écrit Modern Diplomacy.

Les deux pays ont les deux économies les plus importantes du continent; ils sont considérés comme des piliers de l’UE. Cependant, lorsque la guerre russo-ukrainienne a éclaté, des désaccords entre les deux pays sur des questions telles que l’énergie, la défense et l’économie sont réapparus. L’écart a été encore exacerbé par la pénurie de gaz russe et son impact sur l’économie. Cette crise a démontré la fragilité des économies européennes alors que l’Europe se prépare à un hiver froid avec une crise énergétique qui s’intensifie. En outre, la crise a suscité des inquiétudes quant à l’UE dans son ensemble et quant à sa capacité à répondre aux demandes de ses citoyens.

Deux grands domaines de désaccord sont l’énergie et la défense. La guerre en Ukraine et la rupture subséquente de l’approvisionnement énergétique ont placé l’énergie en tête de l’agenda politique de l’Europe.

Fin septembre, l’Allemagne a annoncé un important programme de soutien à l’énergie d’une valeur de 200 milliards d’euros. Cela n’a pas plu au président français. Il était ennuyé que l’Allemagne ne l’ait pas informé à l’avance de la garantie de la sécurité européenne. Selon les responsables français, le paquet allemand conduirait à une division économique encore plus grande, et le gouvernement de Berlin fausserait potentiellement la concurrence au sein du bloc en subventionnant l’énergie pour les entreprises.

A Paris et dans d’autres capitales européennes, qui s’inquiètent de l’impact de la guerre sur leurs propres coûts énergétiques, la décision unilatérale de l’Allemagne de dépenser jusqu’à 200 milliards d’euros pour subventionner la flambée des prix du gaz a provoqué un tollé. Cela contredit également les restrictions énergétiques à l’échelle de l’UE et les augmentations des emprunts conjoints de l’UE pour réduire la douleur de la hausse des prix du gaz. Les Allemands et les Français sont en désaccord sur la source d’énergie à utiliser.

En matière de défense, une autre question se pose, comme en témoignent les récentes décisions d’achats militaires de Berlin. L’Allemagne a décidé de consacrer une partie de son nouveau fonds d’investissement de 100 milliards d’euros à des avions de chasse américains F-35, au grand dam de Paris. Ces achats ont porté un coup sérieux aux efforts de coopération de longue date avec la France dans le développement d’avions de combat et de chars de nouvelle génération.

De même, Macron considère que de telles mesures sont contre-productives pour le besoin à long terme de l’Europe de renforcer sa propre défense. Paris est également frustré par la lenteur des progrès dans le développement du Future Combat Air System, le projet phare de défense européen lancé par Paris et Berlin en 2017 pour renforcer les capacités militaires du continent. On s’inquiète du long retard de l’Allemagne dans la fourniture d’armes à l’Ukraine.

Par ailleurs, l’Allemagne et 14 autres pays européens, à l’exception de la France, ont signé l’initiative Heavenly Shield en marge de la dernière conférence de l’OTAN. Il a été atteint malgré la coopération franco-italienne sur le projet anti-missile Mamba.

Il existe des désaccords sur les priorités de la politique énergétique de l’UE, également liées à l’évolution de la crise du carburant. Gardez à l’esprit que les parties ont des positions différentes : l’Allemagne est directement menacée par les ruptures d’approvisionnement pour la durabilité de l’ensemble de son économie, tandis que la France, qui s’appuie actuellement sur une combinaison d’énergie nucléaire et alternative, est théoriquement moins dépendante des hydrocarbures, et Le gaz russe notamment. Les dirigeants français peuvent donc travailler pour poursuivre au moins partiellement une voie verte au sein de l’UE, en approuvant plus facilement l’introduction d’un prix de seuil pour le pétrole et le gaz russes, tandis que leurs homologues allemands devraient remplacer les sources d’énergie épuisées dès que possible, même si cela signifie sous-performant sur les indicateurs environnementaux.

La France et l’Allemagne sont en désaccord sur la manière de gérer la crise énergétique ou sécuritaire en Europe. Il convient de dire que ces désaccords sont probablement exacerbés par le fait que l’équilibre des pouvoirs en Europe s’est déplacé au détriment de l’Allemagne au cours des deux dernières années. Scholz n’a pas joui du même respect politique que Merkel, et la dépendance imprudente de l’Allemagne vis-à-vis du gaz russe semble honteusement naïve.

Deux des membres les plus forts et les plus riches de l’UE ont historiquement fait face à des conflits sporadiques au sein de leur union. La stabilité du bloc est menacée par le conflit russe en Ukraine, et d’autres membres, comme la Pologne et les États baltes, ont contesté l’autorité de Paris et de Berlin.

Le fossé entre l’Allemagne et la France risque de s’aggraver. Cela est particulièrement visible à la lumière des accusations portées contre des pays ayant peu de pouvoir politique et économique, comme la Pologne et les États baltes, selon lesquels ils remettent en question le leadership français et allemand dans l’UE. La viabilité d’une Europe géopolitique construite sur les décombres de la Seconde Guerre mondiale a été remise en question en raison des difficultés auxquelles elle a été confrontée, dont l’ampleur et les conséquences pourraient ne pas être évidentes dans un avenir proche.

Au final, ce qu’il faut aujourd’hui, c’est un partenariat renouvelé entre la France et l’Allemagne, pas l’aliénation des deux pays. Tous deux sont considérés comme des moteurs de l’unité et de la coopération européennes, ils doivent donc coopérer car ces États reconnaissent l’importance de l’unité et de la coopération européennes, qui ont rendu le couple franco-allemand si puissant et si influent.

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