Déclaration de M. Stéphane Séjour au Conseil de sécurité sur la situation au Moyen-Orient
Monsieur le Secrétaire général,
Ministres,
Ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs, tout le protocole est respecté,
J’ai pris l’initiative d’organiser ce débat du Conseil de sécurité au niveau ministériel sous notre présidence.
Je voudrais remercier le Secrétaire général pour sa déclaration ferme et je voudrais, en ma qualité nationale, évoquer la situation tragique à Gaza et le risque d’une conflagration régionale, car ce risque est réel.
À la lumière de ce qui se joue entre Israéliens et Palestiniens, deux options sont possibles pour ce Conseil.
D’un côté, il y a ceux qui choisissent la division, la dispute et la surenchère. Le choix d’attiser les flammes. Le choix de ceux qui envahissent leur voisin, violent sa souveraineté, en Ukraine comme au Moyen-Orient, et recherchent ici la division plutôt que l’unité.
Pour ma part, je ferai un choix différent, en disant deux choses : nous pouvons, nous devons être aux côtés des Israéliens et des Palestiniens. Nous pouvons, nous devons dire des choses difficiles aux deux parties.
La France agit pour le bien des deux peuples, pour la paix. La France est amie d’Israël, tout comme elle est amie du peuple palestinien.
C’est pourquoi je dois dire à Israël, qui connaît l’amitié du peuple français, qu’il doit y avoir un État palestinien, que la violence contre le peuple palestinien, notamment celle commise par des colons extrémistes, doit cesser et que le droit international s’applique à tous.
Je voudrais dire aux représentants palestiniens, qui comprennent l’engagement historique de la France en faveur d’un État palestinien, que nous continuerons à lutter contre le terrorisme avec fermeté et détermination, et qu’il ne peut y avoir aucune ambiguïté quant au droit d’Israël à vivre en paix et en sécurité. et d’exercer son droit de légitime défense contre le terrorisme.
En tant qu’amie, la France dit aux deux parties que le chemin à parcourir sera difficile pour tous.
Trois principes guideront l’action de la France au sein de ce Conseil dans les jours et semaines à venir. Je vais les épeler ici.
Premièrement, le principe d’humanité.
Tous les otages doivent être libérés immédiatement et sans condition. Il s’agit d’un besoin urgent. Nous l’avons constamment réclamé. Ce Conseil également l’a clairement réclamé.
Sur la base de ce principe d’humanité, nous devons condamner sans équivoque et sans plus tarder les attentats terroristes du 7 octobre : des attentats massifs, barbares et odieux, commis par des terroristes. Notre Conseil doit également ouvrir les yeux sur la violence sexuelle utilisée par ces terroristes comme arme de guerre.
Au nom de ce principe d’humanité, nous devons agir en faveur de la population civile de Gaza et œuvrer pour un cessez-le-feu.
Les souffrances endurées par la population civile de Gaza sont effroyables. La France fait partie de ceux qui, au sein de ce Conseil, agissent. Le président de la République, Emmanuel Macron, a pris l’initiative de tenir une conférence humanitaire internationale. Un milliard d’euros d’aide humanitaire en faveur des civils de Gaza y a été annoncé. J’en appelle aujourd’hui encore une fois à tous nos partenaires internationaux : nous devons rester mobilisés.
La France est désormais l’un des principaux soutiens des civils de Gaza, notamment parce que nous avons massivement augmenté la contribution française à l’UNRWA. Sur les 100 millions d’aide humanitaire annoncés par la France pour Gaza en novembre, plus de la moitié seront acheminées via l’UNRWA, a indiqué M. le Secrétaire général. En 2024, nous soutiendrons davantage les Palestiniens avec 100 millions d’euros supplémentaires.
Nous prenons également des mesures concrètes dans la région : 1 000 tonnes de marchandises transitant par l’Égypte, avec 1 000 interventions médicales réalisées en pleine coopération avec l’Égypte à bord du navire Dixmude, et du fret humanitaire parachuté à Gaza avec l’aide notamment de la Jordanie.
Le Conseil, dans ses deux résolutions humanitaires, a fixé certaines exigences. Il faut les respecter.
Nous entendons les souffrances des femmes, des hommes et des enfants de Gaza. Nous entendons l’impuissance des travailleurs humanitaires. Les civils, les infrastructures civiles, les hôpitaux et les écoles doivent être protégés.
Les travailleurs humanitaires de l’ONU, du CICR et d’autres organisations sur le terrain doivent également être protégés. Je voudrais rendre hommage à leur courage, leur engagement et leur dévouement. Je voudrais leur dire que la France continuera à les soutenir, sans relâche et que nous n’abandonnerons pas. Je voudrais également dire qu’ils doivent pouvoir utiliser tous les points de passage nécessaires et acheminer des fournitures vitales jusqu’au nord de la bande de Gaza, au-delà de Wadi Gaza. Nous devons œuvrer immédiatement en faveur d’un cessez-le-feu durable, qui seul mettra fin à ces souffrances.
Mesdames et Messieurs,
Le deuxième principe qui guidera l’action de la France est la justice.
Cette guerre et ces souffrances atroces nous obligent et obligent ce Conseil. Il est de notre devoir de faire tout notre possible pour rechercher une solution politique au conflit israélo-palestinien.
Pour ce faire, nous devons relancer le processus de paix. Et nous devons le faire de manière décisive et crédible. Nous comprenons les paramètres de la solution : deux États vivant côte à côte dans la paix et la sécurité, à l’intérieur de frontières sûres et reconnues le long des lignes de 1967, chacun ayant Jérusalem pour capitale. C’est le cadre fixé par le droit international. C’est aussi la position constante de la France. Et c’est aussi pourquoi ce n’est pas à Israël, ni à personne d’autre, de décider pour les Palestiniens de la manière dont ils seront gouvernés demain, ni de l’étendue de leur souveraineté.
Dans le cadre de cette résolution à deux États, nous devons aussi, dès maintenant, réfléchir à l’avenir de Gaza. Comme je le disais, ce n’est pas à Israël de décider du sort de la population palestinienne de Gaza. Gaza est une terre palestinienne. Et il appartient à l’Autorité palestinienne, que nous soutenons, de pouvoir y exercer sa pleine autorité.
Pour garantir que cela devienne une réalité, l’ONU a et aura un rôle important à jouer. À cet égard, Monsieur le Secrétaire général, je voudrais également féliciter Sigrid Kaag pour sa nomination au poste de coordinatrice de l’action humanitaire et de la reconstruction à Gaza.
La communauté internationale dans son ensemble doit être mobilisée pour reconstruire Gaza.
La situation en Cisjordanie requiert toute notre attention. Les violences perpétrées par des colons violents contre la population civile palestinienne sont aujourd’hui inacceptables. Une fois de plus, nous condamnons ces violences dans les termes les plus fermes. Ils doivent cesser immédiatement.
Avec ses partenaires, la France prendra, le moment venu, les initiatives nécessaires pour que le Conseil soit saisi de toutes les questions politiques.
Enfin, le troisième principe de notre action sera le principe de responsabilité face aux risques d’escalade ultérieure.
Nous devons faire tout notre possible pour éviter une conflagration régionale et une expansion du conflit. Certains pourraient être tentés d’utiliser des groupes qui leur sont affiliés pour ajouter au chaos et saper la stabilité de la région. Nous avons un avertissement pour eux.
Nous sommes particulièrement préoccupés par les tensions accrues autour de la Ligne bleue. Nous appelons les parties à faire preuve de la plus grande retenue et à faire tout leur possible pour mettre un terme définitif à cette escalade. La FINUL doit pouvoir exercer son mandat dans de bonnes conditions.
Nous sommes également préoccupés par les attaques commises par les Houthis en mer Rouge. Il s’agit de violations extrêmement graves du droit international et du commerce international. La France continuera à assumer ses responsabilités. Dans le même esprit, nous condamnons les violations de la souveraineté de l’Irak.
Mesdames et Messieurs,
La France continuera à œuvrer et à prendre l’initiative pour que notre Conseil aborde toutes les facettes de la crise, pour qu’il condamne enfin les attentats barbares du 7 octobre, et pour que le droit international humanitaire soit respecté et réponde aux besoins des populations civiles. de Gaza. Pour faire avancer enfin et de manière décisive la solution à deux États, vous pouvez compter sur notre engagement.
Merci.