Critique : La France en procès : le cas du maréchal Pétain

Critique : La France en procès : le cas du maréchal Pétain

Le procès pénal du maréchal Philippe Pétain à Paris en 1945 fut celui du plus haut gradé militaire accusé de trahison, pour avoir trahi son pays par collaboration avec l’ennemi. Le contraste des fortunes personnelles était extrême : Pétain avait, en tant que commandant suprême des armées françaises pendant la Grande Guerre, dirigé le défilé de la victoire sur les Champs-Élysées en 1919. En effet, le titre de « maréchal » est un honneur plutôt qu’un grade militaire. . Il a été décerné aux généraux en reconnaissance d’un service exceptionnel en temps de guerre uniquement.

En 1940, les armées françaises avaient été mises en déroute humiliante par les forces allemandes et Pétain était devenu chef du gouvernement français. Un armistice convenu a permis aux Allemands d’occuper les deux tiers de la France, y compris Paris, et le gouvernement français s’est installé à Vichy, une ville thermale, dans le centre de la France. En octobre 1940, Pétain rencontra Hitler, lui-même un acte profondément politique, et bien que le résultat ne soit pas concluant, la rencontre était un coup de propagande pour les Allemands. L’armistice signé était une suspension des hostilités, bien que les Allemands aient le contrôle.

Le procès de Pétain était un procès politique, étant donné la nature des questions controversées. La principale incertitude était peut-être la pénalité. Le procès, cependant, n’aurait pas été une mascarade et il s’est déroulé comme un procès pénal, même s’il promettait également d’être une occasion d’auto-éducation quant aux événements qui ont présidé à la mise en place du gouvernement de Vichy. Le procès était un examen d’un crime présumé, par collaboration avec un ennemi, dans le contexte de la politique nationale.

Ce qu’il y avait à apprendre d’un tel procès était moins qu’absolument certain, et une bande de moins en moins nombreuse de pétainistes nostalgiques essaie toujours de réhabiliter le gouvernement de Vichy, tandis que d’autres sont susceptibles de se concentrer sur le rôle de ce gouvernement dans la déportation de 75 000 Juifs. Ce fut une caractéristique notable du procès de Pétain qu’aucun témoin juif n’a été invité à témoigner. Il est à peine croyable maintenant que le sort des Juifs ait été périphérique au procès de Pétain.

Ce livre est le point de vue de l’historien sur un procès pénal et son contexte et c’est aussi un excellent ouvrage pour le grand public. Les avocats écossais trouveront facilement la description des préparatifs nécessaires dans le cadre de la procédure française pour le procès lui-même très similaire aux dispositions traditionnelles en Ecosse. Le placement des participants dans la salle d’audience et la dynamique probatoire et procédurale du procès inquisitorial lui-même sont très probablement totalement inconnus du lecteur moderne.

L’accusation de trahison, compte tenu des décisions politiques controversées à une époque de grand danger et d’incertitude nationale, rend le procès difficile à imaginer maintenant, et pourtant le récit maintient l’intérêt du lecteur tout au long. La preuve de la trahison et la commutation immédiate de la peine en réclusion à perpétuité n’ont pas surpris à l’époque. Pétain est mort en prison en 1951.

L’exposition claire du professeur Jackson d’un procès pénal dans le contexte de l’histoire française moderne est une excellente illustration d’une certaine catégorie d’affaires aux conséquences politiques graves, au-delà de celles des accusés. L’aphorisme cité selon lequel «la trahison est une question de dates» est éclairant, tout comme les difficultés à obtenir convenablement, peut-être, des juges et des avocats prêts à assumer leurs rôles professionnels dans des affaires aussi sensibles.

Julian Jackson, France on Trial: The Case of Marshal Pétain (Londres: Allen Lane, 2023)

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