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Comment la salmoniculture phare de France envisage de s’adapter au changement climatique

Avec 24 enclos en filet, Saumon de France, basée à Cherbourg, est l’une des plus grandes piscicultures du pays. Rachetée en 2014 par Pascal Goumain, aujourd’hui son président, la ferme produit actuellement jusqu’à 400 tonnes de saumon et 200 tonnes de truite arc-en-ciel par an.

L’entreprise a récemment décidé de produire des post-saumoneaux plus gros afin de réduire la durée de séjour des poissons en mer et d’améliorer leurs chances d’atteindre les 3 000 tonnes de saumon qu’elle est autorisée à produire. La décision a été prise après une crise majeure survenue à l’été 2022.

Le changement climatique a anéanti la totalité du stock. La température dans la Manche a atteint 21 °C pendant (un) mois, soit 3 à 4 °C au-dessus de la température idéale pour les saumons, explique Goumain.

Le nouveau modèle implique une approche de production en plusieurs phases, dans laquelle les saumons passent plus de temps dans des installations de recirculation terrestres, afin de limiter leur exposition aux défis marins.


Vous manquez de temps ? Regardez un bref résumé de cet article

Nous achetons nos œufs auprès de sociétés telles que Hendrix Genetics ou Benchmark Genetics. Ils sont élevés pendant un an en eau douce dans notre écloserie de Chartres, qui a une capacité de production de 200 000 saumoneaux. Ensuite, les post-saumoneaux sont pré-engraissés à Saumon d’Isigny dans un RAS d’eau salée de six à huit mois jusqu’à ce qu’ils pèsent 1,2 kg, explique Goumain.

L’idée est de mettre les jeunes poissons dans nos cages-filet vers novembre et de les récolter en juin, lorsqu’ils atteignent 4 kg. De cette façon, nous évitons la production (en mer) pendant l’été. Nous aimerions contrôler l’ensemble du processus : depuis l’œuf jusqu’à la mise à l’eau des saumoneaux et la récolte des adultes, ajoute-t-il.

Pour ce faire, Goumain envisage de dupliquer chaque étape du cycle : avec deux écloseries et deux installations RAS pour les post-saumoneaux.

Nous avons un permis de construire pour un deuxième système post-saumoneaux en boucle fermée à Cherbourg d’une capacité de 200 à 300 tonnes. De cette façon, s’il y a un problème à n’importe quelle étape du cycle, nous (pouvons) éviter une interruption de la production, explique-t-il.

Confrontés à des défis similaires, les producteurs de saumon d’autres régions d’Europe opèrent également des changements similaires dans leurs cycles de production, observe Goumain.

Le passage à ce nouveau système semble prendre forme pour la Norvège et l’Écosse comme une bonne adaptation au changement climatique », réfléchit-il.

En plus d’éviter les risques sanitaires, réduire l’exposition en haute mer présente des avantages économiques et zootechniques, selon le producteur français. Cependant, Goumain estime que les petites installations RAS sont préférables aux grandes.

En termes de gestion des risques, il est plus facile d’être agile avec des systèmes plus petits. Mais le risque zéro n’existe pas en aquaculture. Le saumon est une espèce domestiquée relativement récemment et les techniques utilisées sont également récentes, ce qui crée une combinaison risquée », argumente-t-il.

Aquaponie et IMTA offshore

L’entreprise développe également d’autres moyens pour être plus résiliente aux changements climatiques et fait partie du projet de gestion aquaponique fondé par Goumain en 2013. En partenariat avec Scael, une coopérative agricole française, l’entrepreneur développe un système aquaponique clé en main qui peut être adopté par les agriculteurs terrestres.

L’idée était de créer un système de haute technologie et à faible coût. Avec un investissement de 200 000 €, l’éleveur peut produire 20 tonnes de truite (arc-en-ciel) et obtenir un revenu complémentaire d’environ 1 200 € par mois », explique Goumain.

Pascal Goumain, propriétaire et président de Saumon de France

Les deux partenaires visent à équiper les premiers agriculteurs en 2024, en installant des aquariums reliés à des systèmes de goutte à goutte pour la culture de légumes, alimentés par l’eau riche en nutriments des aquariums.

À plus long terme, le groupe de gestion a récemment obtenu des parcelles sur un parc éolien offshore qui devrait être construit au large de Cherbourg d’ici 2030.

Nous supposons qu’en allant plus loin et plus profondément dans l’océan, nous devrions avoir de meilleures conditions environnementales pour notre saumon. Dans un premier temps, nous souhaitons tester l’agriculture dans ces conditions à plus petite échelle, une fois le parc éolien offshore déployé », explique Goumain.

De plus, il voit le projet comme une opportunité de tester un système d’aquaculture multitrophique intégré (IMTA), intégrant une certaine forme de production de macroalgues aux côtés du saumon. Cela pourrait constituer une autre option alors que l’entreprise cherche à réaliser à la fois ses propres ambitions et les objectifs du gouvernement.

Saumon de France exploite la salmoniculture en enclos en filet la plus au sud d’Europe

Le changement climatique les oblige à laisser leur ferme en jachère pendant les mois les plus chauds de l’année.
© Saumon de France

Le ministère français de l’Agriculture s’est fixé comme objectif d’élever 20 000 tonnes de saumon en France d’ici 2030, explique Goumain.

Et sans surprise, Goumain est bien décidé à capitaliser sur ce soutien, avec le projet d’élever chaque année 6 000 tonnes de saumons entre son site de Cherbourg et ses projets offshore, en plus de 2 000 tonnes de truites.

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