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Ce qu’il faut savoir sur les manifestations des agriculteurs en Europe

Morgan Ody, une agricultrice française de 44 ans originaire de la région vallonnée de Bretagne, a entrepris un voyage en train de 12 heures à travers Paris avant d’arriver finalement à Bruxelles, la capitale belge. Là-bas, elle a rejoint des dizaines de milliers d’agriculteurs qui sont descendus dans la rue jeudi pour exiger que les dirigeants européens fassent davantage pour les aider à remédier à leur situation économique.

Ody, qui représente un syndicat agricole français appelé Confdration Paysanne, affirme que les agriculteurs du continent européen étaient déjà confrontés à de mauvaises conditions provoquées par la baisse des revenus, les coûts élevés et la concurrence des importations bon marché. Mais aujourd’hui, l’annonce récente par l’UE de politiques vertes plus strictes menace d’aggraver la situation.

La situation est déjà difficile pour les agriculteurs, qui sont complètement surchargés car ils travaillent trop, explique Ody au TIME. Et maintenant, l’UE veut conclure davantage d’accords de libre-échange, ce qui créera une concurrence impossible à surmonter.

Après des semaines de protestations à travers le continent, l’escalade dans la capitale belge jeudi a vu des artères bloquées par des tracteurs et des pneus brûlés, tandis que des agriculteurs d’Allemagne, de France, de Belgique, d’Italie et de Grèce jetaient des œufs sur le Parlement européen, allumaient des feux de joie et a même renversé une statue de John Cockerill, un industriel britannique du XIXe siècle.

Pourquoi les agriculteurs européens protestent-ils ?

Actuellement, le secteur agricole représente 11 % des émissions de gaz à effet de serre de l’UE, que l’UE espère réduire en réorganisant sa politique agricole commune existante, un système de subventions annuelles d’une valeur de près de 60 milliards de dollars. Les nouvelles politiques, qui font partie du pacte vert européen qui vise à rendre le bloc climatiquement neutre d’ici 2050, comprendraient l’obligation pour les agriculteurs de consacrer au moins 4 % des terres arables à des activités non productives. Ils doivent également effectuer des rotations de cultures et réduire l’utilisation d’engrais d’au moins 20 %.

La protestation des agriculteurs belges atteint les bâtiments de l'UE à Bruxelles
Des tracteurs agricoles bloquent les rues près du Parlement européen le 1er février 2024 à Bruxelles, en Belgique. Pier Marco TaccaGetty Images

Mais de nombreux agriculteurs affirment que ces mesures rendront le secteur agricole européen moins compétitif face aux importations. Jeudi, les représentants des syndicats d’agriculteurs ont déclaré aux journalistes qu’ils en avaient assez d’une manière générale de trop d’administration et de règles leur indiquant comment ils devaient cultiver.

Pour Ody, qui s’est entretenu avec TIME au nom de la Coordination européenne Via Campesina, la voix collective des paysans d’Europe, la colère est alimentée par la contradiction. D’un côté, on nous demande de cultiver de manière plus durable, ce qui est assez juste car nous savons que la crise climatique existe parce qu’elle nous affecte, dit-elle. Mais en même temps, on nous demande de continuer à produire le moins cher possible, ce qui nous met dans une situation impossible.

Même si de nombreux griefs sont partagés par les agriculteurs du continent entier, leurs préoccupations varient également d’un pays à l’autre. En Allemagne, les agriculteurs protestent contre le projet de Berlin visant à supprimer progressivement les allégements fiscaux sur le diesel agricole afin d’équilibrer le budget, ce qui, selon eux, les mènerait à la faillite. Aux Pays-Bas, les agriculteurs se révoltent contre l’obligation de réduire les émissions d’azote. En France, les syndicats agricoles ne sont pas impressionnés par les concessions proposées par le gouvernement du président Emmanuel Macron et se battent pour de meilleurs salaires, moins de bureaucratie et une protection contre la concurrence étrangère.

La guerre en Ukraine n’a fait qu’empirer les choses en provoquant une pénurie d’approvisionnement due à l’agression de la Russie, en bouleversant les flux commerciaux et en augmentant les coûts de l’énergie, des engrais et du transport pour les agriculteurs de nombreux pays de l’UE.

Quelles mesures les gouvernements prennent-ils pour résoudre la situation ?

Quelles mesures les gouvernements européens prennent-ils pour aider les agriculteurs ?

Après les manifestations de jeudi à Bruxelles, Macron a appelé l’UE à mettre en œuvre une réforme agricole, affirmant que le secteur agricole européen est confronté à une grande crise et doit profondément modifier ses règles en mettant en œuvre un mécanisme européen commun pour garantir des prix équitables payés aux agriculteurs par les géants de l’alimentation et les supermarchés. . Le Premier ministre français nouvellement élu, Gabriel Attal, a également annoncé un programme d’aide d’un montant de 160 millions de dollars pour les agriculteurs français dans le besoin, après quoi deux grands syndicats d’agriculteurs ont déclaré qu’ils demanderaient à leurs membres de suspendre les manifestations.

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Des agriculteurs néerlandais et belges brûlent des palettes en bois et des pneus alors qu’ils bloquent le poste frontière entre la Belgique et les Pays-Bas, à Arendonk, le 2 février 2024.Rob EngelaarAFP/Getty Images

Partout en Europe, la même question se pose : comment continuer à produire plus mais mieux ? Comment pouvons-nous continuer à lutter contre le changement climatique ? Comment éviter la concurrence déloyale des pays étrangers ? » a déclaré Attal jeudi en annonçant les mesures.

L’engagement d’Attal fait suite à des mesures d’une valeur de près de 430 millions de dollars que plusieurs gouvernements européens ont déjà annoncées pour aider à apaiser la colère des agriculteurs, tandis qu’au niveau européen, la Commission européenne propose d’assouplir les exigences en matière d’agriculture verte tout en autorisant les subventions agricoles.

Mais alors que les dirigeants européens peinent à concilier la nécessité de préserver les moyens de subsistance agricoles tout en réduisant l’impact de l’agriculture sur le climat, les agriculteurs comme Ody affirment qu’ils sont toujours en colère et qu’ils continueront à se mobiliser lors des manifestations. Notre principale revendication est que nous obtenions une loi européenne garantissant que le prix que nous obtenons couvre le coût de production, y compris les revenus, dit-elle.

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