Breton veut qu’une banque d’investissement européenne finance le nucléaire et se range aux côtés de la France
La Banque européenne d’investissement (BEI) doit soutenir les principales politiques publiques de l’UE et doit donc financer l’énergie nucléaire, a déclaré mercredi aux journalistes le commissaire au Marché intérieur, Thierry Breton, se rangeant effectivement du côté de la France.
Le nucléaire est au cœur de nombreux débats européens. Il est pertinent pour fixer des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, réformer le marché de l’électricité de l’UE, la taxonomie verte de l’UE et, plus généralement, développer une industrie européenne à faibles émissions de carbone.
L’énergie nucléaire est en marche (en Europe). Bien sûr, cela doit être financé, et bien sûr, je pense que la BEI devrait le faire, a déclaré Breton, ajoutant que l’objectif de la BEI est de soutenir le Green Deal, un paquet législatif phare de l’UE pour lutter contre le changement climatique.
Son développement nécessite cependant des financements importants, que la BEI pourrait être amenée à apporter : en juillet, le ministre français de l’Economie, Bruno Le Maire, s’est dit lui aussi favorable au financement par la BEI de l’énergie nucléaire.
Rien dans les statuts de la BEI ne l’empêche de financer la technologie et les infrastructures nucléaires, si les États membres et les actionnaires effectifs de la banque parviennent à un consensus.
Mais si la France est un fervent partisan historique du nucléaire, l’Allemagne, dont les dernières centrales viennent d’être fermées au profit d’une politique énergétique 100 % renouvelable, s’y oppose ouvertement.
Ainsi, Breton se range effectivement du côté des Français, ajoutant : Je pense que (la BEI) devrait financer le mix énergétique de tous les États membres. L’énergie est une compétence nationale exclusive : si (les États membres) veulent développer leur mix énergétique, ils doivent le financer, et c’est exactement ce que la BEI doit faire.
Il en va de même pour la défense, devenue un enjeu clé de la politique européenne depuis la guerre en Ukraine en février 2022 : il est normal que la BEI s’adapte pour soutenir les politiques de l’Union, notamment en matière de défense, a déclaré le commissaire.
Lutte pour la présidence de la BEI
Les revendications des Bretons interviennent alors que la course à la nomination d’un nouveau président de la BEI s’accélère.
Deux candidats semblent en tête : la vice-présidente de la Commission européenne chargée de la Concurrence Margrethe Vestager et la vice-Première ministre espagnole Nadia Calvio.
La BEI est devenue une institution européenne d’importance primordiale depuis que la Commission, dans sa révision du cadre financier pluriannuel (CFP) introduite en juin, a exclu tout nouveau cycle de dette commune de l’UE.
À Paris, le scepticisme de Vestager à l’égard du nucléaire n’est cependant pas le bienvenu, et Bruno Le Maire a clairement indiqué que la France ne soutiendrait qu’un candidat pro-nucléaire.
Emmanuel Macron et Vestager étaient également en désaccord en juillet sur la nomination provisoire de Fiona Scott Morton au poste d’économiste en chef de la DG Concurrence. Macron a activement rejeté la nomination.
Le nucléaire est finalement un sujet extrêmement sensible au sein des Etats membres de l’UE, un sujet sur lequel le conseil d’administration de la banque est très divisé, selon le vice-président de la BEI, Ambroisse Fayolle, lors d’une conférence de presse en février dernier.
À ce jour, la BEI n’a financé que deux projets liés au nucléaire et liés à la sûreté des centrales existantes.
(Aurlie Pugnet a contribué au reportage)
(Théo Bourgery-Gonse | EURACTIV.fr)