Macron s’en va à fond – Le risque pour la France augmente

Les élections européennes ont laissé le centre toujours en place, les Verts gravement endommagés, une soirée mitigée pour l’extrême droite, Meloni ascendant à travers l’Europe et Macron non seulement endommagé mais désormais mis en péril par sa décision de convoquer des élections. Scholz en Allemagne est également blessé, mais au moins il ne s’est pas mis en danger comme Macron.

D’un point de vue européen, le « centre » européen au Parlement semble tenir le coup (le PPE s’en sort bien) et un nouvel exécutif (Von der Leyen, etc.) sera très probablement élu. Son élan est renforcé par la bonne performance de Donald Tusk et la bonne performance du parti de Friedrich Merz en Allemagne.

L’événement majeur se déroule en France, où le Rassemblement National a obtenu des résultats conformes aux sondages, lors de ses meilleures élections de son histoire, et Emmanuel Macron a convoqué des élections législatives pour fin juin/début juillet.

Même si cette décision aurait été préparée il y a quelques mois, c’est à mon avis une erreur – faisant écho à la décision récente de Rishi Sunak par exemple. Mon sentiment est que le vote pour le RN est bien ancré, Macron est personnellement impopulaire auprès d’une grande partie de l’opinion publique et le risque est que la tentative efficace de Macron de construire une coalition anti-extrême droite (comme c’est le cas en Roumanie et au Portugal) échoue dans le Le sentiment qu’un large vote pour le RN persiste et qu’une grande coalition (de socialistes, de républicains et d’En Marche) est très difficile à rassembler. Une telle coalition devrait probablement adopter une position plus dure sur l’immigration par exemple, ce qui serait très difficile à mettre en œuvre. Une telle coalition ne disposera pas non plus d’espace budgétaire (la dette française a récemment été dégradée). C’est aussi la fin de l’expérience Attal.

Je m’attendais à ce que Macron réagisse à une telle défaite en inclinant davantage son gouvernement vers la droite, comme c’est généralement le cas en Europe. Au lieu de cela, il a décidé de parier sur des élections, en espérant que, comme par le passé, chaque fois que la France a été contrainte de choisir entre l’extrême droite et le centre, elle optera pour le centre. Cette fois, ce sera peut-être différent.

Macron peut compter sur le fait que le RN n’est pas prêt à se battre dans une élection (il en va de même pour les autres partis) et que le résultat de l’élection sera une mosaïque de partis sur lesquels il pourra gouverner. Mon instinct est que c’est un pari énorme. Dans les prochains jours, je m’attends à ce qu’il y ait des pactes électoraux entre certains partis afin de maximiser les sièges détenus par les partis qui composeront la nouvelle coalition potentielle.

L’implication pour la France et l’Europe est que si cela ne suit pas le chemin de Macron, l’incertitude politique et économique en France augmentera, et Macron – le moteur efficace de l’élan politique en Europe – deviendra un président boiteux. La perspective d’un gouvernement RN (dirigé par Bardella ?) est extrêmement difficile pour Macron, et il est surprenant qu’il ait ouvert la porte à cela, surtout à l’approche des Jeux olympiques. Il existe un risque réel que ce résultat et la perspective d’un gouvernement RN suscitent des risques dans l’eurosystème.

Dans L’Accord du Peuple (Calmann-Levy), Pierre-Charles Pradier et moi-même remarquons que l’élite française doit impliquer davantage le peuple dans la politique, et Macron a lancé le gant. Il s’agit d’une démarche très risquée et qui entraînera une énorme mobilisation politique, avec de nombreuses complexités logistiques (vacances scolaires, sélection des candidats).

Ailleurs en Europe, les résultats sont globalement conformes aux attentes et encouragent la tenue du centre. Le PPE reste le plus grand parti et le centre (S&D, PPE et RE) disposera de près de 400 sièges, ce qui permettra à certains partis et parlementaires qui n’auront pas l’habitude de voter pour Ursula von der Leyen, mais à certains indépendants et petits groupes de le faire, à mon avis. c’est que le passage du prochain exécutif de la CE ne sera pas perturbé.

Plus précisément, en Pologne, les partis pro-européens ont fait mieux que prévu, au Portugal, Chega n’a pas égalé le nombre de voix qu’il a obtenu lors des récentes élections, et en Irlande, le Sinn Fein a fait beaucoup moins bien que prévu. La coalition d’Olaf Scholz est encore plus fragilisée, et ce n’est peut-être pas une mauvaise chose si cela accélère l’approche des élections. L’AfD a gagné, mais bien moins que ce que suggéraient les récents sondages.

En général, la politique européenne évolue vers la droite et le Parlement sera plus actif sur les questions de droite. À mon avis, l’initiative stratégique en Europe ne sera que peu perturbée (sauf que son principal intellectuel, Macron, sera lésé) en ce qui concerne la politique concernant l’Ukraine, l’IA/les services numériques et les infrastructures. L’accent sera certainement moins mis sur la réglementation verte, mais peut-être pas sur les investissements verts. Le nouveau champ de débat sera celui de la défense, avec la perspective que l’Europe ait un commissaire à la défense et un nouveau commissaire aux affaires étrangères plus énergique (Kallas ?).

Sur le plan économique, nous sommes dans l’antichambre d’un cycle de baisse des taux dans la zone euro et l’activité économique se redresse à peine après des niveaux plus faibles. La décision de Macron ajoute un risque extrême aux actifs en euros et signifie qu’il existe une grande incertitude sur la politique économique française.

Le drame va continuer.

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