Frances seul producteur de caviar à cycle complet

L’estuaire de la Gironde, dans la région Frances Nouvelle-Aquitaine, avait autrefois une pêche florissante pour l’esturgeon sauvage européen (Acipenser sturio). Cependant, l’espèce était tellement surexploitée pour son caviar qu’elle a failli disparaître dans les années 1970, ce qui a conduit à une interdiction de pêcher l’espèce en 1982. Depuis 2010, la CITES interdit la pêche et le commerce de tous les esturgeons sauvages dans le monde.

En réponse aux restrictions de 1982, le CEMAGREF, institut public français de recherche en agronomie et environnement, a rapidement introduit l’esturgeon de Sibérie (Acipenser baeri) souche en France pour la production aquacole. Et la Nouvelle-Aquitaine, l’ancien bastion de la pêche française à l’esturgeon, abrite désormais six des sept élevages d’esturgeons du pays.

Parmi ceux-ci, L’Esturgeonnire se distingue par son propre couvoir et son intégration verticale, de l’éclosion au conditionnement. Grâce à un personnel qualifié de 20 salariés, la ferme produit chaque année 4 tonnes de caviar.

Comment la ferme a évolué

Lorsque Michel Berthomier et un associé rachètent la ferme en 2007, il comprend rapidement que s’il veut maîtriser la qualité de ses esturgeons de Sibérie et donc la qualité du caviar, l’écloserie est la clé de voûte de la démarche. A cette époque, il n’y avait qu’un seul couvoir d’esturgeons en France Couvoir de Guyennes, également situé en Gironde, Berthomier a décidé de saisir cette opportunité et a créé un couvoir sur place, appelé Nurseteich, en 2008. L’année suivante, un partenariat avec l’INRAe l’Institut National de la Recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement a été créé pour développer des programmes de sélection génétique, largement basés sur la taille, la texture et la couleur des œufs. Ils sont également vigilants sur d’autres critères zootechniques comme la croissance, la belle conformation, la répartition homogène des gonades etc. Comme le résume le propriétaire : une grande partie du succès réside dans la génétique.

C’est le seul élevage d’esturgeons français qui a été construit exclusivement pour cette espèce, explique Berthomier en évoquant les origines de l’élevage. Créée en 1991 au Teich, dans le Bassin d’Arcachon, la ferme produisait initialement des esturgeons pour leur chair. Cependant, en 1999, lorsque L’Esturgeonnire est racheté par le groupe dans lequel Berthomier travaillait à l’époque, ils décident de se tourner vers la production de caviar.

Dans les années qui ont suivi l’achat, d’importants investissements ont été réalisés dans l’infrastructure. D’abord pour augmenter la capacité d’élevage de 150 à 300 tonnes d’esturgeons. Puis, en 2006, 3 millions ont été investis dans le système de filtration, faisant de la ferme une pionnière en termes de normes environnementales en pisciculture d’eau douce. La ferme a commencé à utiliser un filtre mécanique avec une grille de 35 et un filtre biologique pour éliminer les déchets de l’eau.

Les déchets étaient ensuite épandus dans trois bassins à boues et les eaux eutrophes recyclées par des roseaux. Le taux de remplacement de l’eau des fermes est d’environ 50 %, les 50 % restants étant recyclés. Même si un taux plus élevé de recirculation de l’eau était possible, la ferme l’évite car, selon Berthomier, cela pourrait donner un goût boueux désagréable au produit final.

Depuis 2020, un intéressant projet de recherche se poursuit en partenariat avec des chercheurs viticoles, qui cherchent à utiliser les eaux usées pour cultiver la prêle, une plante qui pourrait être une alternative écologique aux produits phytosanitaires contre les maladies de la vigne.

Le cycle de fabrication

Chaque printemps, dans les 12 étangs de l’écloserie, Nurseteich produit 100 000 juvéniles Acipenser baeri d’esturgeons, dont 20 % restent à la ferme, tandis que les 80 % restants sont vendus aux éleveurs du monde entier. Pouvoir produire des juvéniles sur place permet une meilleure gestion de la production en amont, de la traçabilité et de la sélection génétique.

Au 6 000 m2 étangs, chaque année 260 à 280 tonnes de femelles d’esturgeon sont élevées. Vers l’âge de trois ans, après sexage échographique, les mâles sont séparés et vendus pour leur viande. Après 8 à 9 ans d’élevage, les œufs de femelles sont généralement prêts à être récoltés. Contrairement à la méthode classique qui nécessite un prélèvement par biopsie, L’Esturgeonnière a décidé de contrôler la taille des ovules à un minimum de 2,6 mm pour les normes Perlita à l’aide d’une dernière échographie. Selon Berthomier, cette technique évite les problèmes de cicatrisation comme les abcès et améliore le bien-être des poissons.

La ferme bénéficie de l’eau de la rivière L’Eyre et d’une source géothermique qui alimente le site en eau plus chaude, notamment en hiver. Cette eau chaude provient d’un ancien puits de pétrole de 2 000 m qui a été cimenté depuis longtemps. Comme la température optimale de l’eau pour la croissance des esturgeons se situe entre 17 et 18 °C, cette source d’énergie permet à la ferme d’améliorer les taux de croissance et de désaisonnaliser sa production de caviar.

Cette géothermie est, avec le système de traitement de l’eau, l’une des deux choses dont Berthomier est particulièrement fier.

Les défis et les ambitions de la ferme

L’objectif principal de la ferme dans les années à venir est de maîtriser sa productivité et de stabiliser la production de caviar à 4 tonnes par an. À la fin de chaque cycle de croissance, les œufs représentent 9 à 10 % du poids d’une femelle d’esturgeon, de sorte que la production peut actuellement varier de 3 à 4 tonnes de caviar par cycle. Le caviar se conserve au maximum 12 mois et il est parfois compliqué de trouver de nouveaux marchés, la prévisibilité est donc un objectif central pour l’équipe de production. Selon Berthomier, cela sera possible grâce à la sélection génétique.

Un autre défi important pour l’entreprise est la hausse du prix de l’électricité, qui augmente les coûts de production.

La France est actuellement le troisième producteur de caviar au monde, derrière la Chine et l’Italie, avec une production de 42 tonnes en 2019 et Berthomier est optimiste quant à l’avenir des marchés, le caviar étant plus abordable que par le passé. C’est pourquoi Caviar Perlita souhaite développer sa stratégie commerciale en vendant davantage au détail, qui représente actuellement 15% de sa distribution. Pour l’avenir, en plus de stabiliser ses niveaux de production actuels, Berthomier envisage également de s’étendre sur un autre site.

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