Jeune France : les ados gaulois de 1965
OA la veille de l’élection présidentielle française de 1965, Observateur Magazine (28 novembre 1965) en route outre-Manche pour un hors-série sur le phénomène culturel et social de la Jeune France : qu’est-ce qui a changé désormais qu’un Français sur trois a moins de 20 ans ?
La révolte des adolescents en France était jugée étonnamment docile et les adolescents français étaient dans l’ensemble inoffensifs. Ils ne s’embarrassent pas de boissons fortes. Leurs modes sont beaucoup moins farfelues que les coiffures exotiques et les vêtements farfelus de leurs homologues britanniques. Pourtant, la révolte étudiante de mai 68 frappera la France comme un cocktail Molotov jeté par-dessus une barricade seulement trois ans plus tard.
Alors comme aujourd’hui, la mode gauloise biaisait le classique, pas le subversif. Des filles aux cheveux brillants ont été photographiées en tweed anglais et Shetland et des manteaux de laine soigneusement boutonnés. Les garçons aspirent à l’élégance anglo-italienne et, gentiment, un engouement récent pour les parapluies avait stimulé la production de brollies noirs.
Un reportage sur les frasques et l’exceptionnalisme de la jeunesse dorée de l’Ecole Polytechnique, l’Oxford PPE de la vie française, a des nuances de Bullingdon. Heureusement, le rocknroll injectait une soupe de sexe et de danger dans la vie gauloise. Les adolescents français (Les Yy comme les adultes les appellent, mi-méprisant, mi-envieux) groovaient devant les Beatles, les Stones et Dylan comme leurs homologues britanniques mais, bien sûr, Johnny Halliday a été mentionné. Le président de Gaulle a écouté Johnny Halliday au moins une fois. On rapporte qu’il a fait remarquer avec approbation : C’est bruyant, comme une fanfare militaire.
Un dictionnaire d’argot français pour adolescents a également fourni des phrases clés pour être avec (dans le coup): Ca chauffe: le rythme est chaud, Ca a fait tilt: on s’entend et Smart: intelligent.
Trois semaines plus tard, de Gaulle, alors âgé de 75 ans, remporte les élections. Le tremblement de terre de la jeunesse française n’était pas encore chose faite.